Page:Eliot - Daniel Deronda vol 1&2.pdf/326

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— Ceci est différent… Si vous croyez que ma visite là-bas puisse avoir un bon résultat pour vous, répliqua Deronda, qui savait que le baronnet avait cette affaire fort à cœur.

— Et puis je ne serais pas surpris que tu y rencontrasses ta belle joueuse, la Diane de Leubronn, fit gaiement sir Hugo. Il faudra que nous les invitions à l’abbaye quand ils seront mariés, Louise, dit-il à sa femme, comme si elle aussi avait lu la lettre.

— Je ne sais pas de quoi vous parlez, répondit lady Mallinger, qui n’avait pas écouté, son esprit étant absorbé par le café que l’on versait, par la coupe défectueuse de ses manches, et par la nécessité de conduire Thérèse chez le dentiste ; — innocentes et louables préoccupations, telles que l’étaient habituellement celles de la bonne lady. Si l’on voulait avoir son portrait, nous dirions qu’elle avait les cheveux blonds-roux (les cheveux de l’époque !), un petit nez romain, des yeux bleus un peu proéminents, des sourcils fins, un visage que ses amies appelaient gras, et des mains avec des fossettes comme celles d’un magnifique bébé.

— Je dis que Grandcourt va épouser la jeune personne que tu as vue à Leubronn, — ne t’en souviens-tu pas ? — miss Harleth, qui jouait à la roulette !

— Mon Dieu ! est-ce un bon parti pour lui ?

— Cela dépend du genre de bonté qu’il aime, objecta sir Hugo en souriant. Elle n’a rien et ses parents pas davantage : cela va lui occasionner pas mal de dépense. Pour mes projets, c’est un bon parti ; car, si je veux sacrifier une certaine somme, il pourra bien consentir à me céder ses droits sur Diplow. Nous l’aurions alors en toute propriété, et, à ma mort, tu pourrais habiter cette résidence que tu aimes.

— Ne parle donc pas aussi légèrement de la mort, mon ami !