Page:Eliot - Daniel Deronda vol 1&2.pdf/401

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l’empereur et l’impératrice allèrent visiter la Cité, dix ans plus tôt.

— Je crois pouvoir dire que vous connaissez cela mieux que nous, s’écriait souvent M. Cohen comme moyen de préface, et toutes les choses dignes d’intérêt étaient racontées en trio.

— Notre bébé s’appelle Eugénie-Esther, dit la jeune madame Cohen.

— C’est étonnant comme l’empereur ressemble à un de mes cousins, dit la grand’mère ; cela m’a frappé comme l’éclair quand j’ai pu le voir. Jamais je ne l’aurais cru.

— Ma mère et moi sommes allés voir l’empereur et l’impératrice au palais de Cristal, raconta M. Cohen. J’ai eu bien du mal, je vous assure, pour l’empêcher d’être aplatie, quoiqu’elle fût à peu près aussi corpulente qu’aujourd’hui. J’aurais cent mères, monsieur, que je n’en conduirais plus une seule voir l’empereur et l’impératrice au palais de Cristal ; vous pensez bien qu’un homme ne peut pas le permettre quand il n’a qu’une mère — même quand elle est aussi forte que celle-ci ; — il frappa légèrement et affectueusement sur l’épaule de sa mère, qui s’épanouit de bonne humeur.

— Votre mère est veuve depuis longtemps peut-être ? dit Deronda, qui saisit l’occasion au vol ; cela a dû vous obliger à prendre soin d’elle plus que vous ne l’auriez fait autrement.

— Oui, oui, il y a eu bien des Yore-Zeit[1] depuis que j’ai dû travailler pour elle et pour moi, répondit vivement Cohen. Je m’y suis mis de bonne heure. Il n’y a rien de tel pour faire de vous un couteau bien aiguisé.

— Père, qu’est-ce qui fait un couteau bien aiguisé ? demanda Jacob la bouche pleine de gâteau.

  1. Anniversaires de mort. (Note du Traducteur.)