Page:Eliot - Daniel Deronda vol 1&2.pdf/403

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— Je suis au regret de vous répondre que non.

Le feu qui avait de nouveau illuminé la physionomie de Mordecai s’éteignit ; il baissa les paupières en regardant ses mains qu’il avait laissé tomber devant lui et ne dit plus rien. Deronda venait de remarquer, ce qu’il n’avait pu faire lors de leur première entrevue, que Mordecai était affligé d’une difficulté de respiration, qu’il considéra comme un signe de consomption.

— J’ai eu autre chose à faire qu’à lire dans les livres, dit M. Cohen ; il m’a fallu apprendre tout seul les choses utiles. Je connais bien les pierres, — il montrait du doigt la bague de Deronda, je ne crains pas de prendre votre bague d’après ma propre évaluation. Mais maintenant, ajouta-t-il avec un accent plus familièrement nasal, qu’est-ce que vous en voulez ?

— Cinquante ou soixante livres, répondit Deronda avec insouciance.

Cohen se tut un instant, plongea les mains dans ses poches, fixa sur son hôte un œil perçant et dit :

— Je ne puis vous les faire. Je serai heureux de vous obliger, mais il m’est impossible d’aller jusque-là. Quarante livres, je dis quarante ; c’est ce que je puis vous prêter sur cette bague.

Deronda s’était aperçu que Mordecai l’avait de nouveau regardé lorsqu’il avait entendu qu’il s’agissait d’une affaire d’argent. Il l’étudia attentivement pendant que Daniel répondait :

— Très bien ; je la retirerai dans un mois, ou à peu près.

— Bon, je vous en ferai la reconnaissance tout à l’heure, dit Cohen qui leva le doigt comme pour signifier que toute conversation devait cesser. Mordecai, Jacob et lui reprirent leurs chapeaux et on commença les grâces par demandes et par réponses. Mordecai continua de les dire tout seul