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Page:Eliot - La Conversion de Jeanne.djvu/144

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SCÈNES DE LA VIE DU CLERGÉ

s’imposait le ministre, sans recourir à la théorie de M. Sickney sur le défaut d’instruction spirituelle. Les docteurs en philosophie ne nous disent-ils pas que nous sommes incapables de discerner un arbre, autrement que par une habileté inconsciente qui combine beaucoup de sensations passées et diverses ; qu’aucun sens n’est indépendant d’un autre, de sorte que dans l’obscurité nous pouvons à peine déguster un ragoût, ou dire si notre pipe est allumée ou non, et que le garçon le plus intelligent qui aurait des griffes ou des sabots au lieu de doigts ne serait probablement susceptible d’aucun développement ? S’il en est ainsi, il est facile de comprendre que notre discernement à l’égard des motifs des autres hommes dépend de l’ensemble complet des éléments que nous pouvons tirer de nos propres conceptions et de notre propre expérience. Pensez à cela, ami, avant de prononcer un jugement précipité, afin que vos sentiments moraux ne soient pas de l’espèce des sabots ou des griffes. L’œil le plus perçant ne servira à rien, si vous n’avez pas des doigts délicats, avec leurs filaments nerveux et subtils, qui échappent aux lentilles scientifiques et vont se perdre dans le monde invisible des sensations humaines.

Quant à M. Jérôme, il tirait les éléments de son opinion sur la morale des profondeurs de sa vénération et de sa pitié. S’il se sentait lui-