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Page:Eliot - La Conversion de Jeanne.djvu/261

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LA CONVERSION DE JEANNE

chambre. Elle épiait avec anxiété le moment où les yeux de son mari pourraient s’arrêter sur elle avec quelque intelligence, et où il pourrait apprendre qu’elle lui avait pardonné.

Combien il était changé depuis ce terrible lundi ! Étendu sans autre mouvement que la respiration irrégulière qui soulevait sa large poitrine et son cou musculeux, ses traits n’étaient plus empourprés, mais pâles, affaissés et hagards. Une sueur froide se condensait en gouttelettes sur son front saillant et sur ses mains maigres, étendues inertes sur les draps du lit. C’était mieux de les voir ainsi qu’agitées convulsivement, comme la semaine précédente.

Jeanne resta assise sur le bord du lit pendant les longues heures de veille, examinant les yeux fermés à moitié, essuyant la transpiration du front et des joues et pressant la froide main insensible. Elle était presque aussi pâle que le mourant, et il y avait des lignes sombres sous ses yeux, car c’était la troisième nuit qu’elle passait à veiller ; mais le regard inquiet de ses yeux noirs et la sensibilité indiquée par les lignes de sa bouche faisaient un singulier contraste avec l’insensibilité et la maigreur du visage qu’elle épiait.

Il y avait un calme profond dans la maison. Jeanne n’entendait d’autre bruit que celui de la respiration de son mari et le tic-tac de la montre posée sur la cheminée. La lampe suspendue