Page:Eliot - Middlemarch, volume 1.djvu/460

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de déshonorant, puisque son mari n’avait pas démérité. C’est à cause de cela, je le sais, que vous avez fait élever M. Ladislaw et pris soin de sa mère.

Dorothée attendit quelques instants, espérant une réponse qui l’aiderait à continuer. Mais il n’en vint pas, et ses paroles lui parurent s’accentuer davantage encore en tombant distinctement dans le noir silence.

— Mais ce qui est certain, c’est que nous devrions regarder ses droits comme beaucoup plus étendus ; la moitié de cette propriété lui revient, de cette propriété que vous m’avez destinée, je le sais. Et je trouve qu’il devrait, dès aujourd’hui, avoir la jouissance de ce que ces arrangements lui assigneraient. Il n’est pas bien, qu’il soit, lui, enchaîné dans la pauvreté, tandis que nous sommes riches. Et, s’il y a quelque objection contre l’emploi dont il m’a parlé, eh bien, en lui donnant sa vraie place et sa vraie part, on lui enlèverait toutes les raisons qui le contraignent à accepter.

— M. Ladislaw vous a probablement entretenue de ce sujet ? dit M. Casaubon avec une certaine vivacité mordante qui ne lui était pas habituelle.

— Certainement non, répondit Dorothée gravement. Comment pouvez-vous le penser, quand il a tout récemment refusé de plus rien recevoir de vous désormais. Je crains que vous ne le jugiez trop sévèrement, mon ami ; il n’a fait que me parler un peu de ses parents et de ses grands-parents, et c’était presque toujours pour répondre à mes questions. Vous êtes si bon, si équitable, vous avez fait tout ce que vous jugiez votre devoir. Mais il me paraît évident que notre devoir est plus que cela ; et c’est à moi de vous en parler, puisque c’est moi qui en retirerais ce qu’on appelle le bénéfice, si nous ne faisions pas ce « plus ».

Après une pause à peine perceptible, M. Casaubon répliqua, non plus avec vivacité comme tout à l’heure, mais avec une énergie plus mordante encore.