Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/437

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tâcher d’y décider Lydgate ; et il lui semblait maintenant, dans un avenir qui lui apparaissait comme dans un panorama magique, se voir lui-même glisser sur cette pente du découragement stérile, cédant misérablement à la sollicitation des circonstances ; c’est là une histoire plus commune que celle d’un marché de perdition accidentel.

Nous sommes bien près du précipice, quand nous commençons à ne plus voir en nous dans l’avenir que des êtres passifs, entraînés dans un morne abandon à des fautes vulgaires et destinés à échouer dans la médiocrité. Le pauvre Lydgate gémissait intérieurement d’en être arrivé là, et Will y arrivait à son tour. Il lui semblait maintenant que sa rage cruelle contre Rosemonde lui avait créé une obligation vis-à-vis d’elle ; et il avait peur de cette obligation ; il redoutait la bienveillance sincère que lui témoignait Lydgate ; il redoutait son propre dégoût pour sa vie gâtée, désormais vide et sans but.



CHAPITRE IX


Dorothée avait promis à M. Farebrother, qu’elle avait vu dans la matinée, d’aller dîner au presbytère, à son retour de Freshitt. Il y avait entre elle et la famille Farebrother un fréquent échange de visites, qui lui permettait de dire qu’elle n’était pas du tout isolée au manoir, et de résister, pour le moment, à la sérieuse injonction de se choisir une dame de compagnie. Quand, à son retour chez elle, elle se rappela sa promesse, elle en fut contente et voyant qu’elle avait encore une heure avant de s’habiller pour le dîner, elle alla droit à l’école causer avec le maître et la maîtresse, prêtant une extrême attention à tous les petits détails et explications