Page:Eliot - Silas Marner.djvu/155

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sa voie à tâtons, son appui lui faisant complètement défaut, Silas avait inévitablement le sentiment — sentiment triste, en vérité, et touchant presque au désespoir — que si aucun secours devait lui arriver, ce ne pouvait être que du dehors. Aussi, éprouvait-il une légère émotion d’espérance à la vue de ses semblables. Il avait une faible idée qu’il devait compter sur leur bienveillance.

Il ouvrit la porte entièrement pour laisser entrer Dolly ; toutefois, sans lui rendre son salut autrement qu’en faisant avancer le fauteuil de quelques pouces, pour lui indiquer qu’elle devait s’y placer. Aussitôt que Dolly se fut assise, elle enleva le tissu blanc qui recouvrait ses gâteaux et dit avec la plus grande gravité :

« Maître Marner, hier j’ai fait cuire au four des gâteaux au saindoux, et ils ont mieux réussi que de coutume. Je venais vous demander de vouloir bien en accepter quelques-uns, si vous le jugiez convenable. Je ne mange pas de ces choses-là moi-même, car ce que je préfère d’un bout de l’année à l’autre, c’est un peu de pain ; mais les hommes ont l’estomac si bizarrement fait, qu’il leur faut du changement, — oui, il leur en faut, je le sais ; que Dieu leur vienne en aide. »

Dolly soupira doucement, en offrant les gâteaux à Silas. Celui-ci la remercia avec bonté et regarda le présent de très près, distraitement, car il était accoutumé à examiner ainsi tout ce qu’il prenait dans la