Page:Eliot - Silas Marner.djvu/185

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rieure qu’aucune fermeté de résolution ne put maîtriser, en voyant M. Godfrey Cass s’avancer pour la conduire à un siège placé entre le sien propre et celui de M. Crackenthorp ; tandis que Priscilla fut invitée à s’asseoir de l’autre côté, entre son père et le squire. Nancy ne songeait pas sans quelque émotion que le prétendant auquel elle avait renoncé, était le jeune homme occupant le plus haut rang parmi les gens de la paroisse, et se trouvant chez lui dans un salon vénérable et unique, qui, d’après l’expérience de cette jeune fille, représentait l’apogée de la grandeur, — salon où elle, Nancy, aurait pu un jour être la maîtresse, avec la pensée qu’en parlant d’elle on l’appellerait « Madame Cass », la femme du squire. Ces particularités rehaussaient à ses yeux le drame de son cœur, et augmentaient l’énergie avec laquelle elle se disait formellement, que la position la plus éblouissante ne la persuaderait pas à accepter pour mari un homme dont la conduite témoignait du peu de cas qu’il faisait de sa propre réputation. Mais elle ajoutait que « n’aimer qu’une fois, et aimer toujours, » était la devise d’une femme sincère et pure ; aussi, nul homme n’aurait jamais sur elle aucun droit qui l’obligeât à détruire les fleurs desséchées qu’elle conservait et conserverait toujours comme un trésor pour l’amour de Godfrey Cass. Et Nancy était capable de tenir dans des circonstances très pénibles la parole qu’elle se donnait à elle-même. Rien, si ce n’est une rougeur bienséante, ne trahit