Page:Eliot - Silas Marner.djvu/220

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dans les bras de Silas Marner. Telle fut son impression immédiate et indubitable, bien qu’il n’eût pas vu sa fille depuis plusieurs mois. Mais, au moment où il commençait à concevoir un peu l’espoir qu’il s’était peut-être trompé, M. Crackenthorp et M. Lammeter, étonnés de cette étrange visite, s’étaient déjà avancés vers Silas. Godfrey les rejoignit aussitôt, incapable de rester en place sans entendre jusqu’au moindre mot. Il essayait de se maîtriser ; pourtant, il avait conscience que, s’il était observé, on ne manquerait pas de s’apercevoir de son agitation et de la pâleur de ses lèvres.

Mais en ce moment tous les yeux, à ce bout de la pièce, étaient fixés sur Silas. Le squire lui-même s’était levé, et lui demandait d’un ton irrité :

« Qu’y a-t-il ? Qu’est-ce que cela signifie ? Qu’avez-vous donc à entrer ici de cette manière ?

— Je suis venu chercher le docteur ; j’ai besoin du docteur, avait dit Silas tout d’abord, à M. Crackenthorp.

— Eh bien, qu’y a-t-il, Marner ? fit le pasteur. Le docteur est ici ; mais exposez tranquillement pourquoi vous avez besoin de lui.

— C’est une femme, répliqua Silas, à voix basse et à moitié hors d’haleine, juste au moment où Godfrey s’avançait. Elle est morte, je crois,… morte dans la neige, aux Carrières,… pas loin de ma porte. »

Godfrey sentit le cœur lui battre avec violence. Il y avait à cet instant une terreur dans son âme :