Page:Eliot - Silas Marner.djvu/275

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excepté ce méchant, — si ceux-là, dis-je, ont été disposés à faire ce qui était juste à votre endroit au cas où ils l’auraient pu, ne doit-on pas compter sur Ceux qui nous ont créés, attendu qu’ils en savent davantage que nous et ont de meilleures intentions. Voilà tout ce dont je puis être sûre ; tout le reste est pour moi une énigme compliquée, lorsque j’y songe : car il y a la fièvre qui est arrivée ; elle m’a enlevé les enfants qui étaient tout à fait grands et ne m’a laissé que les plus faibles ; il y a les membres cassés ; il y a ceux qui, voulant bien agir et ne pas boire avec excès, ont à souffrir de la part de ceux qui sont différents. Oh ! il y a des ennuis dans ce monde, et il y a des choses que nous ne sommes jamais en état de comprendre ! Tout ce que nous devons faire, c’est d’avoir confiance, maître Marner, c’est d’accomplir notre devoir autant que cela nous est possible, — c’est d’avoir confiance. Or, si nous qui ignorons tant de choses, nous sommes à même de remarquer qu’il existe quelque bien et quelque justice, soyons certains qu’il y a plus de bien et de justice que nous ne sommes capables d’en concevoir ; — je sens en moi-même qu’il ne peut en être autrement. Et si vous aviez pu continuer à avoir confiance, maître Marner, vous n’auriez pas fui vos semblables et vous n’auriez pas été délaissé à un tel point.

— Ah ! mais cela aurait été difficile, dit Silas, à voix basse ; il aurait été difficile d’avoir confiance alors.