Page:Eliot - Silas Marner.djvu/324

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indécise qui avait tenu l’anneau nuptial, et l’avait mis au doigt de sa mère. Son imagination s’était précipitée dans le passé et dans l’avenir, et s’était livrée à des conjectures et à des prévisions pour comprendre ce que signifiait cette paternité révélée. En outre, il y avait, dans les dernières paroles de Godfrey, des mots qui contribuaient à rendre ces prévisions particulièrement définies. Ce n’est pas que ces pensées, soit sur le passé, soit sur l’avenir, eussent aucune influence décisive sur la résolution d’Eppie, car cette résolution avait été fixée par les sentiments qui vibraient au son de chacune des paroles proférées par Silas. Mais, même en dehors de ces sentiments, le double courant des réflexions de la jeune fille fit naître en elle une répulsion pour le sort qu’on lui offrait, et pour ce père qui venait de se révéler.

La conscience de Silas, d’un autre côté, était de nouveau tourmentée. Il était saisi de la crainte que l’accusation de Godfrey ne fût vraie, et que sa propre volonté ne s’élevât comme un obstacle au bonheur d’Eppie. Pendant quelques instants, il resta silencieux, luttant avec lui-même, car il voulait se maîtriser assez, avant dé prononcer des paroles qui lui coûtaient. Elles sortirent enfin, tremblantes, de sa bouche.

« Je ne dirai plus rien. Ce sera comme vous voudrez. Parlez à l’enfant. Je ne veux rien empêcher. »

Nancy elle-même, malgré toute la sensibilité délicate de son cœur, partageait l’opinion de son