Page:Eliot - Silas Marner.djvu/99

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monde disait que le père voulait dépouiller son fils de ce que celui-ci avait du tailleur, pour en faire un gentilhomme à force de le faire monter à cheval. Ce n’est pas que je ne sois tailleur moi-même ; mais, considérant que Dieu m’a placé dans cette condition, j’en suis fier, car les mots Macey tailleur ont été inscrits au-dessus de notre porte, avant même que l’effigie de la reine disparut de dessus les shillings[1]. Quant à Cliff, il avait honte d’être appelé tailleur. En outre, il était cruellement vexé de ce qu’on se moquait de sa façon de monter, et aucune personne de distinction du voisinage ne pouvait le supporter. Cependant, son pauvre garçon tomba malade et mourut. Le père ne vécut pas longtemps après. Il était devenu plus bizarre que jamais. On a rapporté qu’il allait dans ses écuries en plein milieu de la nuit, une lanterne à la main, et y plaçait un grand nombre de chandelles allumées. Il en était arrivé à ne plus pouvoir dormir, et il se tenait là, faisant claquer son fouet, et regardant ses chevaux. On a dit également que c’était un miracle si les écuries n’avaient pas été réduites en cendres, avec les pauvres bêtes qui y étaient renfermées. Mais il mourut enfin dans le délire, et on trouva qu’il avait laissé ses propriétés — les Garennes et le reste — à une fondation de Londres. Voilà comment les Garennes sont devenues un bien de fondation. Toutefois, en ce qui concerne les écuries,

  1. Allusion au retrait ces shillings frappés sous la reine Anne, en 1702. (N. du Tr.)