Page:Elzenberg - Le Sentiment religieux chez Leconte de Lisle, 1909.djvu/33

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fusion peut et doit cesser[1] ? Lamennais était démocrate, épris de liberté, il traitait les rois de tyrans : et toutes ces tendances, il les justifiait par le christianisme. Analysant les principes du christianisme, il concluait qu’ils ne différaient pas des aspirations libérales modernes[2], et Leconte de Lisle, entendant parler non plus d’iniquité romaine, mais de justice, d’égalité, de progrès et de liberté à chaque page, dut reconnaître qu’il n’abandonnerait rien de son libéralisme et de son indépendance en se laissant aller où le sentiment l’attirait. Aussi s’emparera-t-il de l’idée offerte, fera du Christ « le sublime libérateur de la pensée »[3], et parmi les bienfaits que lui doivent les hommes, entre l’amour et l’'immortelle espérance, il n’oubliera pas la liberté[4]. Il disait autrefois : « républicain et philosophique » ; maintenant il dirait plutôt « républicain et chrétien ». Quant à Lamennais, malgré des désaccords sur des points de détail, qui attestent l’indépendance d’es-

  1. Livre du Peuple, chap. XIV : « Le christianisme, enseveli sous l’enveloppe mortelle qui le recouvre comme un suaire, reparaîtra dans la splendeur de sa vie perpétuellement jeune. Séparé de l’œuvre mortelle avec laquelle on l’a confondu, il est la loi première et dernière de l’humanité. »
  2. Affaires de Rome. Dans l’édition des Œuvres complètes en 12 volumes, t. XII, p. 296 et suiv.
  3. Esquisse sur Chénier (Variété).
  4. Issa ben Mariam (ibid).