Page:Elzenberg - Le Sentiment religieux chez Leconte de Lisle, 1909.djvu/76

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rier ne se lassait pas d’affirmer, était devenue un dogme pour tous ses disciples. Elle l’est restée pour Leconte de Lisle, d’après qui — il le proclame très nettement, — le bien même ne peut se définir autrement que « ce qui est conforme à la nature humaine »[1]. Dans les Poèmes, à coup sûr, l’optimisme n’est pas si parfait ; et cependant comme les nobles qualités morales y éclatent de toutes parts ! Les personnages des récits historiques et légendaires sont parfois des modèles de haute vertu, d’héroïsme sublime. Ces épithètes données à Hialmar : « jeune, brave, riant, libre et sans flétrissures »[2] s’appliqueraient à beaucoup ; d’autres sont moins riants peut-être, mais sans flétrissure certainement, et plus grandioses, comme ceux du Massacre de Mona, ou comme Hypatie ou le vieux barde de Temrah, qui se sacrifient pour la religion de leurs pères ; il y en a enfin que le poète a peine à approuver, comme les ascètes chrétiens, et que cependant il ne peut s’empêcher d’admirer, vibrant d’enthousiasme pour cette « race magnanime », sans égard à ce que leur idéal est le contraire du sien : tant il est sensible à la beauté morale sous toutes ses formes.

Rien ne diminue donc son grand attachement pour la vie. C’est une assertion qui aurait pu paraître

  1. Catéchisme populaire républicain, p. 6.
  2. Le cœur de Hialmar, fin. [Poèmes barbares, p. 78.]