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Page:Emerson - Société et solitude, trad. Dugard.djvu/257

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des hôpitaux et des écoles dans l’armée. Nous avons vu une femme qui par son seul chant pouvait attendrir l’âme de foules entières. Il n’est point de limites à cette variété de talents.

Ce sont là des dons dont nous devons être reconnaissants — car chacun marque une nouvelle orientation de la puissance humaine. Nous ne pouvons que les respecter. Notre civilisation est faite d’un million de contributions de cette espèce. Quant au succès, nous le regardons assurément pour les autres comme une pierre de touche, puisque tout d’abord nous en jugeons ainsi pour nous-mêmes. Nous nous respectons davantage quand nous avons réussi. Nous ne refusons pas non plus à chacun de ces bienfaiteurs l’éloge ou le profit qui résulte de son travail.

On trouve déjà dans ces exemples des degrés de mérite moral tout à fait différents. Je ne sais si nous, et ailleurs les gens de notre race, n’accordons pas plus d’importance à la richesse, à la victoire, aux grossières supériorités de toutes sortes, que ne le font les autres hommes — mais nous avons moins de tranquillité d’esprit, sommes moins aisément satisfaits. Dès l’enfance, on inculque au Saxon le désir d’être le premier. Le Scandinave était un cavalier, un combattant, un pirate incapable de repos. Les anciennes Ballades scandinaves le représentent comme affligé de cette soif de victoire inextinguible. La mère dit à son fils :

Que le succès soit en ton destrier,
Qu’il soit en toi, c’est le mieux pour la lutte,
Qu’il soit en toi, dans ta main, dans ton pied,
Dans ton combat contre l’homme et la brute :