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Page:Emerson - Société et solitude, trad. Dugard.djvu/47

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reproduction de la forme humaine sur la toile ou avec de la cire — un grossier dessin en couleur représentant un paysage, où l’on n’a visé qu’à l’imitation — toutes ces choses donnent à l’œil inexercé, à l’être sans culture, qui ne demande pas de délicates jouissances spirituelles, presque autant de plaisir qu’une statue de Canova ou un tableau du Titien.

Et dans la statue de Canova ou la peinture du Titien, ces choses donnent une grande partie du plaisir ; elles sont la base sur laquelle l’esprit délicat édifie des joies supérieures, mais auxquelles elles sont indispensables.

Un autre élément à retrancher du génie de l’artiste, c’est ce qui dans son travail relève de la convention, élément qui entre pour beaucoup en toute œuvre d’art. Ainsi dans chaque bâtiment particulier, chaque statue, chaque mélodie, chaque tableau, poème ou harangue, que de choses ne sont pas originales ! — tout ce qui est national ou usuel, par exemple, l’usage de construire toutes les Églises romaines en forme de croix, la distribution prescrite des différentes parties du théâtre, l’habitude de draper les statues dans le costume classique. Cependant, qui pourrait nier que l’élément purement conventionnel de l’œuvre ne contribue beaucoup à son effet ?

Une dernière considération épuisera, ce me semble, la liste des éléments à retrancher du génie de l’artiste en une œuvre quelconque. C’est l’élément extrinsèque. Ainsi le plaisir que nous donne un noble temple n’est dû qu’en partie au temple. Il est magnifié par la beauté de la lumière, du soleil, le jeu des images, le paysage qui l’entoure, le groupe qu’il forme avec les maisons, les arbres, les tours du voi-