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Page:Emerson - Société et solitude, trad. Dugard.djvu/72

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meilleures ni pires que celles qui y sont imprimées, fera beaucoup d’impression sur notre peuple aisément satisfait. Ces parleurs sont de la classe qui réussit, comme le fameux maître d’école, en n’étant en avance sur l’élève que d’une seule leçon. Ajoutez-y un peu d’esprit sarcastique, de promptes allusions aux incidents du jour, et vous avez le membre néfaste du Parlement. Un grain de méchanceté, une touche brutale dans sa rhétorique, ne lui feront aucun tort vis-à-vis de son auditoire. Ces talents sont de la même espèce, et seulement d’un degré plus élevé, que les boniments du commissaire-priseur et le langage injurieux bien caractérisé par l’expression populaire « coup de gueule ». Ces sortes de discours publics et privés ont leur intérêt et leur avantage pour les professionnels, mais on peut dire de telles gens que l’habitude de la parole est propre à les disqualifier pour l’éloquence.

Un de nos hommes d’État disait : « La malédiction de ce pays, ce sont les hommes éloquents. » Et l’on ne peut s’étonner du malaise que montrent parfois des hommes d’État exercés, ayant une grande expérience des affaires publiques, quand ils constatent la façon disproportionnée dont l’éloquence l’emporte soudain sur les services publics les plus nombreux et les plus réels. Au Sénat, ou en d’autres assemblées d’affaires, les résultats solides dépendent d’un petit groupe de travailleurs. Ils savent comment agir en face des faits, comment présenter les choses sous une forme pratique, et n’estiment les hommes que dans la mesure où ils peuvent faire avancer la tâche. Mais voici un nouveau venu, incapable de les aider, insignifiant, n’étant rien dans le Comité, mais ayant