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Page:Emerson - Société et solitude, trad. Dugard.djvu/84

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choses ; et tout ce que l’on appelle éloquence me semble, dans la plupart des cas, peu utile à ceux qui l’ont, mais inestimable pour ceux qui ont quelque chose à dire.

À côté de la connaissance du fait et de sa loi, vient immédiatement la méthode, qui constitue le génie et l’efficacité de tous les hommes remarquables. Une foule de gens montent à Faneuil Hall[1] ; tous connaissent assez bien le but de la réunion ; ils ont tous lu les faits dans les mêmes journaux. L’orateur ne possède aucune information que ses auditeurs n’aient aussi ; cependant, il leur apprend à voir la chose par ses propres yeux. Grâce à un nouvel arrangement, les circonstances acquièrent plus de force et de prix. Par le fait qu’il le cite, chaque détail gagne en importance, et les riens prennent de la valeur. Ses paroles les fixent dans la mémoire des hommes, et volent de bouche en bouche. Son esprit a un nouveau principe de classement. Là où se portent ses regards, les choses se précipitent à leur place. Que va-t-il dire ensuite ? Qu’il parle, et que lui seul parle. En appliquant aux affaires ordinaires de ce monde les habitudes d’une forme de pensée plus haute, il introduit partout où il va la beauté et la grandeur. Tel était le don de Burke, et nous avons eu quelques brillants exemples de ce génie dans notre propre monde d’hommes de loi et d’hommes politiques.

Les Images. Dans une certaine mesure, l’orateur doit être un poète. Nous sommes des êtres si imaginatifs que sur l’esprit humain, barbare ou civilisé, rien n’agit comme une figure. Concentrez quelque expé-

  1. Ancien Hôtel de ville de Boston (T.).