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Page:Emery - Vierges en fleur, 1902.djvu/130

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VIERGES EN FLEUR

délicieuse, eh bien, je la prendrai, moi, par tous les saints du ciel ! Soyons alliés plutôt, mon ami l’imbécile, et faisons un pacte. L’âme sera pour vous quand j’aurai pris le corps.

— Cette monstrueuse pensée ne me révolte pas. Oui, oui, initiez Luce à la faute des Èves. Qu’elle connaisse la joie des sens pour qu’elle sache bien son amertume et sa désillusion ! Alors, désabusée, déçue, préservée par la triste expérience contre la tentation, elle me reviendra ; je verserai des baumes sur les cicatrices de son cœur ; elle sera mon amie reconnaissante à tout jamais !

— Naïf ! Mais il y a des femmes, lorsqu’elles ont goûté au baiser, qui n’ont plus qu’un désir, s’y délecter sans cesse, se livrer totalement aux bouches des amants !

— Mon ami, je suis très malheureux…

— Frappez-vous la poitrine et murmurez : Mea culpa, mea culpa ! Moi, si j’étais l’abbé Le Manach, je ne me supplicierais pas, je ne me lamenterais pas. Depuis des mois déjà, Luce serait ma maîtresse ; je chanterais, joyeux, la digue digue don !

— Mais vous êtes le diable, vous !

— Je n’ai pas cet honneur mais croyez bien que je le regrette.

— Ah ! je voudrais pouvoir arracher de ma