doute… mais je suis très heureuse, et j’ai peur que demain le cauchemar encore me prenne, me désole.
Puis, après un silence :
— Et vous, mon compagnon, votre cœur saigne-t-il toujours ? N’êtes-vous pas, comme moi, doucement ému par cette nuit salutaire ; son baume ne s’épand-il pas aussi sur votre plaie ?
— Oui. Celle que j’adore ressuscite. Je la vois.
— Pardonnez-moi, si mes paroles ont troublé votre songe, effacé la vision.
— Ce n’est pas un fantôme qui surgit sur les flots et que le vent emporte… C’est vous, vous, ô ma sœur de désespoir, qui m’évoquez ma reine. Oh ! demeurez ainsi, immobile, rigide sous la robe de deuil… car je la reconnais. Ce n’est plus Marie-Reine que je porte en cette barque, c’est la Reine Marie… ma bien-aimée, l’élue…
— C’est la Reine Marie !…
— L’amante de mon rêve… Celle que je cherchais, m’apparaît : illusion, sans doute, je le sais. Mais cette nuit du moins, un peu de réel se mêle à ma folie sans espoir.
— Je ressemble sans doute à votre amie défunte. C’est ma toilette peut-être qui vous la rappelle. Était-elle jolie ? Et quel âge avait-elle ? Et dites-moi aussi, je vous prie, la date de sa mort.