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Page:Emery - Vierges en fleur, 1902.djvu/324

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VIERGES EN FLEUR

surprendre un vestige de vie. Mais les seins étaient froids et durs ainsi qu’un marbre.

Alors, l’amant se coucha dans la barque, enlaça dans ses bras le corps de l’adorée, mit ses lèvres brûlantes sur les lèvres glacées, et dans un long baiser se fiançant à Marie :

— Ma douce et chère aimée, dit-il, l’heure de nos noces tristes est venue. Ah ! je n’espérais pas un pareil dénouement. Mais puisque la vie n’a pas voulu nous unir, la mort va mieux nous joindre ; nos corps entrelacés seront la proie des flots ; nous aurons pour sépulcre immense et glorieux la mer, cette mer que tu aimais tant, dont les ors illusoires et les gemmes irréelles attiraient ton désir. Mais nos âmes immortelles se fondront dans la joie, dans l’au-delà, l’azur.

Un craquement se fit entendre.

Philbert ferma les yeux.

Il pensa que l’esquif se brisait contre les écueils de l’île ; et ses mains, ses jambes se nouant à Marie-Reine, il attendit la mort.

Mais la bouche glacée qu’il avait sous ses lèvres se ranima soudain, s’ouvrit, éperdument lui rendit ses baisers. Leurs souffles et leurs caresses se mêlaient ; les corps se rapprochaient.

— Marie ! cria Philbert.

— C’est moi ! répondit-elle : je suis la désirée que ton rêve appelait. Aimons-nous, mon amant,