Page:Emile Zola, Mes haines - Mon salon - Edouard Manet, Ed. Charpentier, 1893.djvu/287

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ajoutez à ces toiles honnêtes signées de noms inconnus, les tableaux exempts de tout examen. Ceux-là sont l’œuvre des peintres que j’aurai à étudier et à discuter

Voilà le Salon, toujours le même.

Cette année, le jury a eu des besoins de propreté encore plus vifs. Il a trouvé que l’année dernière le balai de l’idéal avait oublié quelques brins de paille sur le parquet. Il a voulu faire place nette, et il a mis à la porte les réalistes, gens qui sont accusés de ne pas se laver les mains. Les belles dames visiteront le Salon en grandes toilettes : tout y sera propre et clair comme un miroir. On pourra se coiffer dans les toiles.

Eh bien ! je suis heureux de terminer cet article en disant aux jurés qu’ils sont de mauvais douaniers. L’ennemi est dans la place, je les en avertis. Je ne parle pas des quelques bons tableaux qu’ils ont reçus par inadvertance. Je veux dire tout simplement que M. Brigot, contre lequel on a pris les plus grandes précautions, aura pourtant deux études au salon. Cherchez bien, elles sont dans les B, quoique signées d’un autre nom.

Ainsi, jeunes artistes, si vous désirez être reçus l’année prochaine, ne prenez pas le pseudonyme de Brigot, prenez celui de Barbanchu. Vous êtes certains d’être acceptés à l’unanimité. Il paraît décidément que c’est une simple affaire de nom.