Page:Emile Zola - L’Œuvre.djvu/160

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
160
LES ROUGON-MACQUART.

quatrième salle, manqua gifler une vieille dame dont les gloussements l’exaspéraient.

— Quels idiots ! dit-il en se tournant vers les autres. Hein ? on a envie de leur flanquer des chefs-d’œuvre à la tête !  

Sandoz s’était enflammé, lui aussi ; et Fagerolles continuait à louer très haut les pires peintures, ce qui augmentait la gaieté ; tandis que Gagnière, vague au milieu de la bousculade, tirait à sa suite Irma ravie, dont les jupes s’enroulaient aux jambes de tous les hommes.

Mais, brusquement, Jory parut devant eux. Son grand nez rose, sa face blonde de beau garçon resplendissait. Il fendait violemment la foule, gesticulait, exultait comme d’un triomphe personnel. Dès qu’il aperçut Claude, il cria :

— Ah ! c’est toi, enfin ! Il y a une heure que je te cherche… Un succès, mon vieux, oh ! un succès…

— Quel succès ?

— Le succès de ton tableau, donc !… Viens, il faut que je te montre ça. Non, tu vas voir, c’est épatant !  

Claude pâlit, une grosse joie l’étranglait, tandis qu’il feignait d’accueillir la nouvelle avec flegme. Le mot de Bongrand lui revint, il se crut du génie.

— Tiens ! bonjour !  continuait Jory, en donnant des poignées de main aux autres.

Et, tranquillement, lui, Fagerolles et Gagnière, entouraient Irma qui leur souriait, dans un partage bon enfant, en famille, comme elle disait elle-même.

— Où est-ce, à la fin ? demanda Sandoz impatient. Conduis-nous. 

Jory prit la tête, suivi de la bande. Il fallut faire le coup de poing à la porte de la dernière salle, pour entrer. Mais Claude, resté en arrière, entendait tou-