Page:Emile Zola - L’Œuvre.djvu/8

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
8
LES ROUGON-MACQUART.

— Merci, je suis bien, je dormirai habillée.

— Comment, habillée, avec ces vêtements qui ruissellent !… Ne faites donc pas la bête, déshabillez-vous tout de suite.

Et il bousculait des chaises, il écartait un paravent à moitié crevé. Derrière, elle aperçut une table de toilette et un tout petit lit de fer, dont il se mit à enlever le couvre-pieds.

— Non, non, monsieur, ce n’est pas la peine, je vous jure que je resterai là.

Du coup, il entra en colère, gesticulant, tapant des poings.

— À la fin, allez-vous me ficher la paix ! Puisque je vous donne mon lit, qu’avez-vous à vous plaindre ?… Et ne faites pas l’effarouchée, c’est inutile. Moi, je coucherai sur le divan.

Il était revenu sur elle, d’un air de menace. Saisie, croyant qu’il voulait la battre, elle ôta son chapeau en tremblant. Par terre, ses jupes s’égouttaient. Lui, continuait de grogner. Pourtant, un scrupule parut le prendre ; et il lâcha enfin, comme une concession :

— Vous savez, si je vous répugne, je veux bien changer les draps.

Déjà, il les arrachait, il les lançait sur le divan, à l’autre bout de l’atelier. Puis, il en tira une paire d’une armoire, et il refit lui-même le lit, avec une adresse de garçon habitué à cette besogne. D’une main soigneuse, il bordait la couverture du côté de la muraille, il tapait l’oreiller, ouvrait les draps.

— Vous y êtes, au dodo, maintenant !

Et, comme elle ne disait rien, toujours immobile, promenant ses doigts égarés sur son corsage, sans se décider à le déboutonner, il l’enferma derrière le