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Page:Emile Zola - La Conquête de Plassans.djvu/203

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LA CONQUÊTE DE PLASSANS.

mademoiselle Aurélie à vingt pas. Il se sentait regardé, il se surpassait vraiment. Mademoiselle Aurélie était, elle aussi, dans un de ses bons jours, au contact d’un tel maître. Le volant, lancé du poignet, décrivait une courbe molle, très allongée ; et cela avec une telle régularité, qu’il semblait tomber de lui-même sur les raquettes, voler de l’une à l’autre, du même vol souple, sans que les joueurs bougeassent de place. L’abbé Surin, la taille un peu renversée, développait les grâces de son buste.

— Très-bien, très-bien ! cria le sous-préfet ravi. Ah ! monsieur l’abbé, je vous fais mes compliments.

Puis, se tournant vers madame de Condamin, le docteur Porquier et les Paloque :

— Venez donc, je n’ai jamais rien vu de pareil… Vous permettez que nous vous admirions, monsieur l’abbé ?

Toute la société de la sous-préfecture forma alors un groupe, au fond de l’impasse. L’abbé Faujas n’avait pas bougé ; il répondit, par un léger signe de tête, aux saluts de M. Delangre et de M. de Condamin. Il marquait toujours les points. Quand Aurélie manqua le volant, il dit avec bonhomie :

— Cela vous fait trois cent dix points, depuis qu’on a changé la distance ; votre sœur n’en a que quarante-sept.

Tout en ayant l’air de suivre le volant avec un vif intérêt, il jetait de rapides coups d’œil sur la porte du jardin des Rastoil, restée grande ouverte. M. Maffre seul s’y était montré jusque-là. Il fut appelé de l’intérieur du jardin.

— Qu’ont-ils donc à rire si fort ? lui demanda M. Rastoil, qui causait avec M. de Bourdeu, devant la table rustique.

— C’est le secrétaire de Monseigneur qui joue, répondit M. Maffre. Il fait des choses étonnantes, tout le quartier le regarde… Monsieur le curé, qui est là, en est émerveillé.

M. de Bourdeu prit une large prise, en murmurant :