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Page:Emile Zola - La Conquête de Plassans.djvu/215

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LA CONQUÊTE DE PLASSANS.

faute, il s’emporta, il lui dit que le confesseur avait seul le droit d’imposer des pénitences. Il la menait très-durement, la menaçait de la renvoyer à l’abbé Bourrette, si elle ne s’humiliait pas.

— J’ai eu tort de vous accepter, répétait-il souvent ; je ne veux que des âmes obéissantes.

Elle était heureuse de ces coups. La main de fer qui la pliait, la main qui la retenait au bord de cette adoration continue, au fond de laquelle elle aurait voulu s’anéantir, la fouettait d’un désir sans cesse renaissant. Elle restait néophyte, elle ne descendait que peu à peu dans l’amour, arrêtée brusquement, devinant d’autres profondeurs, ayant le ravissement de ce lent voyage vers des joies qu’elle ignorait. Ce grand repos qu’elle avait d’abord goûté dans l’église, cet oubli du dehors et d’elle-même, se changeait en une jouissance active, en un bonheur qu’elle évoquait, qu’elle touchait. C’était le bonheur dont elle avait vaguement senti le désir depuis sa jeunesse, et qu’elle trouvait enfin à quarante ans ; un bonheur qui lui suffisait, qui l’emplissait de ses belles années mortes, qui la faisait vivre en égoïste, occupée à toutes les sensations nouvelles s’éveillant en elle comme des caresses.

— Soyez bon, murmurait-elle à l’abbé Faujas ; soyez bon, car j’ai besoin de bonté.

Et lorsqu’il était bon, elle l’aurait remercié à deux genoux. Il se montrait souple alors, lui parlait paternellement, lui expliquait qu’elle était trop vive d’imagination. Dieu, disait-il, n’aimait pas qu’on l’adorât ainsi, par coups de tête. Elle souriait, elle redevenait belle, et jeune, et rougissante. Elle promettait d’être sage. Puis, dans quelque coin noir, elle avait des actes de foi qui l’écrasaient sur les dalles ; elle n’était plus agenouillée, elle glissait, presque assise à terre, balbutiant des paroles ardentes ; et, quand les paroles se mouraient, elle continuait sa prière par un élan de tout son