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LES ROUGON-MACQUART


— Mais il me semble que j’ai bien fait de ne pas te délivrer de Louise. Vous allez vite, tous les deux.

Et elle ajouta, avec une sorte de dépit :

— C’était indécent, à table.

Maxime se mit à rire.

— Ah ! oui, nous nous sommes conté des histoires. Je l’ignorais, cette fillette. Elle est drôle. Elle a l’air d’un garçon.

Et comme Renée continuait à faire la grimace irritée d’une prude, le jeune homme qui ne lui connaissait pas de telles indignations, reprit avec sa familiarité souriante :

— Est-ce que tu crois, belle-maman, que je lui ai pincé les genoux sous la table ? Que diable, on sait se conduire avec une fiancée !… J’ai quelque chose de plus grave à te dire. Écoute-moi… Tu m’écoutes, n’est-ce pas ?

Il baissa encore la voix.

— Voilà… M. de Mussy est très malheureux, il vient de me le dire. Moi, tu comprends, ce n’est pas mon rôle de vous raccommoder, s’il y a de la brouille. Mais, tu sais, je l’ai connu au collège, et comme il avait l’air vraiment désespéré, je lui ai promis de te dire un mot…

Il s’arrêta. Renée le regardait d’un air indéfinissable.

— Tu ne réponds pas ?… continua-t-il. C’est égal, ma commission est faite, arrangez-vous comme vous voudrez… Mais, vrai, je te trouve cruelle. Ce pauvre garçon m’a fait de la peine. À ta place, je lui enverrais au moins une bonne parole.

Alors, Renée qui n’avait pas cessé de regarder Maxime de ses yeux fixes, où brûlait une flamme vive, répondit :

— Va dire à M. de Mussy qu’il m’embête.