Page:Emile Zola - Le Docteur Pascal.djvu/79

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— Tu entends, Clotilde ! s’écria Pascal ravi. Je n’ai pas le temps de le voir ce soir, nous reviendrons demain. C’est mon jour de visite… Ah ! si j’osais, si elle était jeune encore…

Ses regards se reportaient sur Tante Dide. Mais Clotilde, qui souriait de son enthousiasme, dit doucement :

— Non, non, maître, tu ne peux refaire de la vie… Allons, viens. Nous sommes les derniers.

C’était vrai, les autres étaient sortis déjà. Macquart, sur le seuil, regardait s’éloigner Félicité et Maxime, de son air de se ficher du monde. Et Tante Dide, l’oubliée, d’une maigreur effrayante, restait immobile, les yeux de nouveau fixés sur Charles, au blanc visage épuisé, sous sa royale chevelure.

Le retour fut plein de gêne. Dans la chaleur qui s’exhalait de la terre, le landau roulait pesamment. Au ciel orageux, le crépuscule s’épandait en une cendre cuivrée. Quelques mots vagues furent échangés d’abord ; puis, dès qu’on fut entré dans les gorges de la Seille, toute conversation tomba, sous l’inquiétude et la menace des roches géantes, dont les murs semblaient se resserrer. N’était-ce point le bout du monde ? n’allait-on pas rouler à l’inconnu de quelque gouffre ? Un aigle passa, jeta un grand cri.

Des saules reparurent, et l’on filait au bord de la Viorne, lorsque Félicité reprit, sans transition, comme si elle eût continué un entretien commencé :

— Tu n’as aucun refus à craindre de la mère. Elle aime bien Charles, mais c’est une femme très raisonnable, et elle comprend parfaitement que l’intérêt de l’enfant est que tu le reprennes. Il faut t’avouer, en outre, que le pauvre petit n’est pas très heureux chez elle, parce que, naturellement, le mari préfère son fils et sa fille… Enfin, tu dois tout savoir.

Et elle continua, voulant sans doute engager Maxime