Page:Emile Zola - Le Rêve.djvu/11

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pelles de son abside. Et elle eut de nouveau un grand frisson, sous la chaleur du fourneau qui commençait à la pénétrer ; et elle ramena son regard par terre, ne bougeant plus.

— Est-ce que tu es de Beaumont ?… Qui est ton père ?

Devant son silence, Hubert s’imagina qu’elle avait peut-être la gorge trop serrée pour répondre.

— Au lieu de la questionner, dit-il, nous ferions mieux de lui servir une bonne tasse de café au lait bien chaud.

C’était si raisonnable, que, tout de suite, Hubertine donna sa propre tasse. Pendant qu’elle lui coupait deux grosses tartines, l’enfant se défiait, reculait toujours ; mais le tourment de la faim fut le plus fort, elle mangea et but goulûment. Pour ne pas la gêner, le ménage se taisait, ému de voir sa petite main trembler, au point de manquer sa bouche. Et elle ne se servait que de sa main gauche, son bras droit demeurait obstinément collé à son corps. Quand elle eut finir elle faillit casser la tasse, qu’elle rattrapa du coude, maladroite, avec un geste d’estropiée.

— Tu es donc blessée au bras ? lui demanda Hubertine. N’aie pas peur, montre un peu, ma mignonne.

Mais, comme elle la touchait, l’enfant, violente, se leva, se débattit ; et, dans la lutte, elle écarta le bras. Un livret cartonné, qu’elle cachait sur sa peau