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Page:Emile Zola - Le Rêve.djvu/138

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Et elle copiait cette image, avec une patience et une adresse d’artiste peignant à la loupe. Après l’avoir reproduite d’un trait un peu gros sur du satin blanc, fortement tendu, doublé d’une toile solide, elle avait couvert le satin de fils d’or lancés de gauche à droite, arrêtés aux deux bouts simplement, libres et se touchant tous. Puis, se servant de ces fils comme d’une trame, elle les écartait de la pointe de son aiguille pour retrouver dessous le dessin, elle suivait ce dessin, cousait les fils d’or de points de soie en travers, qu’elle assortissait aux nuances du modèle. Dans les parties d’ombre, la soie cachait complètement l’or ; dans les demi-teintes, les points s’espaçaient de plus en plus ; et les lumières étaient faites de l’or seul, laissé à découvert. C’était l’or nué, le fond d’or que l’aiguille nuançait de soie, un tableau aux couleurs fondues, comme chauffées dessous par une gloire, d’un éclat mystique.

— Ah ! dit brusquement Hubert, qui commençait à détendre la bannière, en dévidant sur ses doigts la ficelle du trélissage, le chef-d’œuvre d’une brodeuse autrefois était d’or nué… Elle devait faire, comme il est écrit dans les statuts, « une image seule qui est d’or nué, d’un demi-tiers de haut… » Tu aurais été reçue, Angélique.

Et le silence retomba, Pour les cheveux, dérogeant à la règle, Angélique avait eu la même idée que Félicien ; celle de ne point employer de soie,