Page:Emile Zola - Le Rêve.djvu/223

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paient, éveillaient en elle les légendes du château d’Hautecœur, Jean V le Grand, Raoul III, Hervé VII. Elle en rencontra deux autres, ceux de Laurette et de Balbine, qui l’émurent aux larmes, dans son trouble. C’étaient ceux des Mortes heureuses, Laurette tombée d’un rayon de lune en allant rejoindre son fiancé, Balbine foudroyée de joie par le retour de son mari qu’elle croyait tué à la guerre, toutes les deux revenant la nuit, enveloppant le château du vol blanc de leur robe immense. Ne les avait-elle pas vues, le jour de sa visite aux ruines, flotter au-dessus des tours, parmi la cendre pâle du crépuscule ? Ah ! qu’elle serait morte volontiers comme elles, à seize ans, dans le bonheur de son rêve réalisé !

Un bruit énorme, répercuté sous les voûtes, la fit tressaillir. C’était le prêtre qui sortait du confessionnal de la chapelle Saint Joseph, et qui en refermait la porte. Elle eut une surprise, en ne retrouvant pas la pénitente, disparue déjà. Puis, quand le prêtre, à son tour, s’en fut allé par la sacristie, elle se sentit absolument seule, dans la vaste solitude de l’église. À ce bruit de tonnerre du vieux confessionnal craquant sur ses ferrures rouillées, elle avait cru que Monseigneur approchait. Elle l’attendait depuis une demi-heure bientôt, et elle n’en avait point conscience, son émotion emportait les minutes.

Mais un nouveau nom arrêtait ses yeux, Féli-