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Page:Emile Zola - Le Rêve.djvu/59

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entrelacée de roses vives, en soie nuancée. Au centre, dans une couronne de petites roses d’or mat, le chiffre de Marie rayonnait, en or rouge et vert, d’une grande richesse d’ornements.

Depuis une heure qu’elle achevait, au passé, les feuilles des petites roses d’or, pas une parole n’avait troublé le silence. Mais l’aiguillée cassa de nouveau, elle la renfila à tâtons, sous le métier, en ouvrière adroite. Puis, comme elle avait levé la tête, elle parut boire dans une longue aspiration tout le printemps qui entrait.

— Ah ! murmura-t-elle, faisait-il beau, hier !… Que c’est bon, le soleil !

Hubertine, en train de cirer son fil, hocha la tête.

— Moi, je suis moulue, je ne sens plus mes bras : C’est que je n’ai pas tes seize ans, et lorsqu’on sort si peu !

Tout de suite, pourtant, elle se remit au travail. Elle préparait les lis, en cousant des coupons de vélin, aux repères indiqués, pour donner du relief.

— Et puis, ces premiers soleils vous cassent la tête, ajouta Hubert, qui, son métier tendu, s’apprêtait à poncer sur la soie la bande de la chape.

Angélique était restée les yeux vagues, perdus dans le rayon qui tombait d’un arc-boutant de l’église. Et, doucement :

— Non, non, moi, ça m’a rafraîchie, ça m’a délassée, toute cette journée de grand air.