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II


Florent venait de commencer son droit à Paris, lorsque sa mère mourut. Elle habitait Le Vigan, dans le Gard. Elle avait épousé en secondes noces un Normand, un Quenu, d’Yvetot, qu’un sous-préfet avait amené et oublié dans le Midi. Il était resté employé à la sous-préfecture, trouvant le pays charmant, le vin bon, les femmes aimables. Une indigestion, trois ans après le mariage, l’emporta. Il laissait pour tout héritage à sa femme un gros garçon qui lui ressemblait. La mère payait déjà très-difficilement les mois de collège de son aîné, Florent, l’enfant du premier lit. Il lui donnait de grandes satisfactions : il était très-doux, travaillait avec ardeur, remportait les premiers prix. Ce fut sur lui qu’elle mit toutes ses tendresses, tous ses espoirs. Peut-être préférait-elle, dans ce garçon pâle et mince, son premier mari, un de ces Provençaux d’une mollesse caressante, qui l’avait aimée à en mourir. Peut-être Quenu, dont la bonne humeur l’avait d’abord séduite, s’était-il montré trop gras, trop satisfait, trop certain de tirer de lui-même ses meilleures joies. Elle décida que son dernier-né, le cadet, celui que les