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Page:Emile Zola - Son Excellence Eugène Rougon.djvu/137

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SON EXCELLENCE EUGÈNE ROUGON.

tout au fond, Rougon l’entendit qui lui appliquait de gros baisers sur les narines. Ces baisers l’exaspéraient.

— Revenez, je vous en prie, cria-t-il. S’il se jetait de côté, vous seriez écrasée.

Mais elle riait, baisait le cheval plus fort, lui parlait avec des mots très-tendres, tandis que la bête, comme régalée de cette pluie de caresses inattendues, avait des frissons qui couraient sur sa peau de soie. Enfin, elle reparut. Elle disait qu’elle adorait les chevaux, qu’ils la connaissaient bien, que jamais ils ne lui faisaient du mal, même lorsqu’elle les taquinait. Elle savait comment il fallait les prendre. C’étaient des bêtes très-chatouilleuses. Celui-là avait l’air bon enfant. Et elle s’accroupit derrière lui, soulevant un de ses pieds à deux mains, pour lui examiner le sabot. Le cheval se laissait faire.

Rougon, debout, la regardait devant lui, par terre. Dans le tas énorme de ses jupes, ses hanches gonflaient le drap, quand elle se penchait en avant. Il ne disait plus rien, le sang à la gorge, pris tout à coup de la timidité des gens brutaux. Pourtant, il finit par se baisser. Alors, elle sentit un effleurement sous ses aisselles, mais si léger, qu’elle continua à examiner le sabot du cheval. Rougon respira, allongea brusquement les mains davantage. Et elle n’eut pas un tressaillement, comme si elle se fût attendue à cela. Elle lâcha le sabot, elle dit, sans se retourner :

— Qu’avez-vous donc ? que vous prend-il ?

Il voulut la saisir à la taille, mais il reçut des chiquenaudes sur les doigts, tandis qu’elle ajoutait :

— Non, pas de jeux de main, s’il vous plaît ! Je suis comme les chevaux, moi ; je suis chatouilleuse… Vous êtes drôle !

Elle riait, n’ayant pas l’air de comprendre. Lorsque l’haleine de Rougon lui chauffa la nuque, elle se leva