particulièrement plat ; il avait pour principe que l’amitié des imbéciles porte bonheur. Delestang, modeste, grave, s’inclinait à chaque compliment.
— Non, venez, dit l’empereur à Rougon.
Et il se décida à le mener dans son cabinet, une pièce assez étroite, encombrée de journaux et de livres jetés sur les meubles. Là, il alluma une cigarette, puis il montra à Rougon le modèle réduit d’un nouveau canon, inventé par un officier ; le petit canon ressemblait à un jouet d’enfant. Il affectait un ton très-bienveillant, il paraissait chercher à prouver au ministre qu’il lui continuait toute sa faveur. Cependant, Rougon flairait une explication. Il voulut parler le premier.
— Sire, dit-il, je sais avec quelle violence je suis attaqué auprès de Votre Majesté.
L’empereur sourit sans répondre. La cour, en effet, s’était de nouveau mise contre lui. On l’accusait maintenant d’abuser du pouvoir, de compromettre l’empire par ses brutalités. Les histoires les plus extraordinaires couraient sur son compte, les corridors du palais étaient pleins d’anecdotes et de plaintes, dont les échos, chaque matin, arrivaient dans le cabinet impérial.
— Asseyez-vous, monsieur Rougon, asseyez-vous, dit enfin l’empereur avec bonhomie.
Puis, s’asseyant lui-même, il continua :
— On me bat les oreilles d’une foule d’affaires. J’aime mieux en causer avec vous… Qu’est-ce donc que ce notaire qui est mort à Niort, à la suite d’une arrestation ? un monsieur Martineau, je crois ?
Rougon donna tranquillement des détails. Ce Martineau était un homme très-compromis, un républicain dont l’influence dans le département pouvait offrir de grands dangers. On l’avait arrêté. Il était mort.
— Oui, justement, il est mort, c’est cela qui est