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4 INTRODUCTION GÉNÉRALE ET HISTORIQUE.


philologue, le linguiste et l’historien, aussi bien que le grammairien, le philosophe, l’arithméticien, le géomètre et l’astronome travaillent pour l’esprit et pour le raisonnement. Il vaudrait mieux dire aussi, la science d’écrire que l’art d’écrire. La daguerréotypie ne peut être comptée parmi les cinq arts plastiques : architecture, céramique, sculpture, peinture et gravure ; ses produits sont des résultats naturels et spontanés, obtenus par un appareil mécanique et optique, dont le maniement demande seulement de la pratique et de l’expérience, mais aucun art personnel.

S’il y a déjà désaccord dans la simple définition de l’art en général, combien cette manifestation de la chaleur de l’âme humaine, cosmopolite avant tout dans ses émanations et antispéciale dans son essence, n’a-t-elle pas donné lieu, dans ce siècle de spécialité, à la création de mots creux et de sectes aussi peu définies que celles du faux socialisme. L’art a eu le sein déchiré par ses propres adeptes qui, sous la bannière de leurs pontifes de hasard ou de prédilection, ont fini par porter même la division dans l’esthétique, dont la sphère devrait pourtant rester au-dessus des rivalités et des partis pris des écoles. L’avenir et la grandeur de l’art, comme ceux de toutes les autres parties de la perfectibilité humaine, dépendent du développement plus complet du sentiment individuel ou de l’individualisme, qui rejette tout chef d’école, du règne d’un éclectisme qui sait préférer sans exclure, et d’une critique où l’abstention du penchant personnel laisse le champ complètement libre à l’esthétique pure dont les bases resteront toujours invariables comme celles de la morale.

Ce sont particulièrement deux tendances qui ont fini par constituer deux partis dans l’art, deux armées inconciliées encore aujourd’hui, quoique leurs luttes ne se passent plus sur la scène et dans les pamphlets. L’un entend fossiliser ce qui est destiné à la vie, à la transformation ininterrompue et au reflet de chaque époque ; il s’est emparé du nom de classique. L’autre affiche le mépris des règles immuables, du bon goût et des convenances, rejette l’idéal et matérialise la pensée ; il croit avoir trouvé des termes nouveaux en s’appelant romantique, naturaliste et réaliste. Le premier, dès qu’il devient intolérant, est le produit de la routine et du manque d’individualisme ; le second est composé le plus souvent d’hommes de peu d’études et de lecture, et dépourvus de vraie poésie, qui, rejetant les résultats de l’expérience, la logique même, veulent parvenir sans travail. L’un tue l’originalité, l’autre l’idéal ; l’un fatigue jusqu’à l’ennui par son respect outré de la tradition et du convenu, l’autre révolte par ses laideurs, son exécution relâchée et son matérialisme affiché. Le premier est faux à force de réglementation et de servilisme rétrospectif ; le second par ses licences et son outrecuidance. L’art n’est compris ni par l’une ni par l’autre de ces sectes qui, parfaitement surannées, s’agitent de nouveau et se croient toutes les deux la seule expression vraie du courant de leur époque. L’artiste doit se tenir éloigné autant de ce faux classique si pétrifié par