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PRÉLIMINAIRE. iij


s'expliquant les unes par les autres. C'est d'ailleurs ainsi qu'elles se produisent à l'entour de nous, dans les relations sociales, dans la vie de tous les jours. Les sciences, les lettres, les arts, dans toute leur variété y sont à peu près également représentés : chacun, suivant ses préoccupations, aborde un sujet particulier, et tour à tour les matières les plus diverses alimentent la conversation, sans que la transition soit brusque ou l'association des idées forcée. Confinée jadis dans les écoles ou dans les obscurs cabinets des érudits, la science maintenant envahit le monde, et sans des connaissances très étendues on se trouve généralement déplacé, dépaysé, et par suite effacé, humilié, dans nos sociétés, où les intérêts de l'esprit occupent aujourd'hui la place que dans d'autres temps on accordait aux intérêts matériels ou à des occupations frivoles. Chimie, physique, religion, morale, politique, histoire, littérature et théâtre, toutes les questions s'agitent journellement dans les réunions d'hommes de toutes les classes ; et l'artiste, le savant ou le philosophe, y trouvent des juges non moins que le guerrier, le ministre ou le prince. La langue usuelle s'enrichit forcément à mesure que le cercle des idées communes s'agrandit, et une foule de locutions qui, il y a cent ans, appartenaient exclusivement au vocabulaire technique, sont entrées aujourd'hui dans le domaine public et apparaissent, sans pédantisme, dans le langage le plus familier.

Ainsi les barrières tombent , et le monopole est abrogé ; ainsi se répandent dans la foule les connaissances et les talens pour lesquels on admirait autrefois les adeptes des sciences et des arts, et qui trop souvent gonflaient d'orgueil ceux qui les possédaient.

C'est donc comme une œuvre de sociabilité et de civilisation bien plus que comme un instrument de la science que les Encyclopédies veulent être envisagées. A la science elles n'offrent qu'un point de départ, et pour ainsi dire un terrain sur lequel elle appuie ses opérations, joint à un moyen commode d'échapper à l'isolement, en ce que par elles la branche spéciale se rattache à l'arbre scientifique tout entier. Mais quant à la civilisation, elles en hâtent réellement les progrès, tout en paraissant ne s'occuper que d'en enregistrer les produits. C'est à elles, en effet, qu'il appartient de faire pénétrer dans les masses la vie intellectuelle ; elles livrent à la foule, en les appropriant à son usage, les trésors qui eussent été uniquement destinés à satisfaire la curiosité des érudits.