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nité qui règne entre la décoration & la construction, si le décorateur fut l’Architecte ou l’Architecte le décorateur. Ce mérite se rencontre dans les beaux ouvrages des anciens : comme les Arts étoient alors unis entr’eux ; qu’on n’en possédoit presque jamais un exclusivement aux autres, soit que l’Architecte exécutât toutes les parties d’un monument, soit qu’il en confiât l’exécution à des coopérateurs, c’étoit toujours une intelligence unique qui présidoit à la confection de tout l’ouvrage ; & comme un seul esprit avoit tout dirigé, l’effet en étoit un, & l’impression non divisée.

Mais, depuis que chez les modernes l’esprit de méthode, si funeste aux Arts, a élevé des barrières entr’eux qui les ont isolés ; depuis que les Arts, se faisant des écoles & des règles à part, ont rompu la parenté qui les unissoit jadis, & ne sorment plus, si l’on peut le dire, une espèce de république fédérative, on a vu chaque Artiste concentré dans l’art qu’il professe, ignorer jusqu’aux plus simples élémens des autres Arts. L’Architecture cependant liée à la Peinture & à la Sculpture par une chaîne commune & dépendante d’eux par des rapports particuliers, a plus qu’aucum autre perdu à cet isolement ; de-là le manque d’Accord entre le style de l’Architecte & le style de ceux auxquels il abandonne la décoration comme une chose qui lui est étrangère, & dont il ne se croit pas responsable. De-la ces disparates choquantes, dans presque tous les monumens où les différens Arts qui devroient s’unir & se prêter la main, sont livrés à la discorde & à l’insubordination d’Artistes mercenaires, qui agissent sans concert, & travaillent sans se connoître, Voyez HARMONIE.

ACCORDER, v. act. mettre d’Accord. Ce mot est particulièrement appliqué à la Peinture ; mais il convient aussi à l’Architecture. Comme le Peintre ne met l’Accord à son tableau que lorsqu’il est assez terminé pour qu’il puisse juger, par l’effet du tout ensemble, des fautes locales contre l’harmonie ; de même l’Architecte qui n’a pu prévoir dans son deslein l’effet général des masses & des détails, se trouve obligé d’Accorder son édifice, soit en supprimant des accessoires, soit en donnant, soit en ôtant de la saillie aux parties. Accorder se dit encore losqu’il faut appliquer, par exemple, à une église Gothique, un portail ou des parties de construction d’un goût différent ; on l’employe aussi pour exprimer la jonction d’un vieil ouvrage à un neuf. Voy. RACCORDER.

ACCOUDOIR, s. m. balustrade ou mur à hauteur d’appui, qu’on pratique devant une croisée ou sur l’extrémité d’un mur de terrasse, ou entre les piedestaux ou socles des colonnes. Voyez Allège, Appui.

ACCOUPLEMENT, s. m. on entend par ce terme la manière d’espacer les colonnes le plus près


qu’il est possible, sans que les bases & les chapiteaux s’engagent les uns dans les autres.

Cette manière de disposer les colonnes fut absolument inconnue aux anciens. Du moins on n’en trouve aucun exemple dans les restes nombreux de leurs monumens de tous les âges, & de tous les pays ; ca c’est par erreur que Serlio & ceux qui l’ont répété d’après lui, ont avancé que les colonnes de l’Arc— de-Pôla étoient accouplées. Les voyageurs modernes qui ont mesuré depuis peu les édifices de cette ville, ont tous relevé cette méprise de Serlio ; c’est aussi, par mégarde, qu’on a cru trouver au petit temple de Spoléto, une autorité antique en faveur de l’Accouplement des colonnes. Cet Accouplement, s’il pouvoit en être un, existe ici entre le pilastre qui fait l’angle de la Cella ou mur du Pronaos, & la colonne du péristyle. Mais ce pilastre ne doit être considéré que comme les Antes ; &, quoique cette disposition ne soit pas très-heureuse, on ne peut cependant en rien conclure pour l’Accouplement des colonnes, d’autant que ce pilastre voisin de la colonne n’est pas même isolé.

Les ruines de Palmyre publiées depuis quelques années par MM. Wood & Dauckins, nous ont cependant fait voir des autorités favorables au systême de l’Accouplement des colonnes ; mais, comme leurs plans ne sont point accompagnés de mesures, & qu’on est trop bien fondé, par tous les détails de leur voyage, à se méfier de la fidélité de leurs élévations, nous ne sçaurions admettre comme preuves, des dessins faits à la hâte, & qui manquent de l’authenticité nécessaire à de pareils ouvrages. En attendant la vérification des ruines de Palmyre qui doit bientôt paroître par les soins & sous les auspices de M. de Choiseul-Gouffier, on ne voit pas encore quelle grande & victorieuse induction on pourroit en tirer en faveur de l’Accouplement des colonnes ; le petit nombre de colonnes accouplées qu’on remarque dans les dessins des voyageurs Anglois, se trouve adossé à un mur comme seroient celles de l’avant-corps du milieu du péristyle du Louvre ; mais dans les nombreuses colonades qui sont encore sur pied dans cette ville, on n’en remarque point qui soient accouplées ; elles y sont toutes au contraire disposées & espacées à entre-colonnemens égaux ; ainsi cette autorité, en lui supposant toute sa force, loin d’en être une, loin d’appuyer le systême moderne, ne pourroit tout au plus se considérer que comme une exception unique à la loi générale ; & que deviendra cette exception d’après les considérations particulières qu’il ne faut point perdre de vue ? Pourroiton oublier que l’Architecture de Palmyre est probablement du temps d’Aurélien, c’est-à-dire, d’un siècle postérieur même à la ruine générale & à l’annéantissement des Arts ? Voyez PALMYRE.

Sans doute Perrault n’eut point connoissance des ruines de Palmyre, ou ce ne fut que par les relations imparfaites des voyageurs de son temps. Si son péristyle du Louvre fait croire que le motif lui en