temple de Phigalie nous parut renfermer sur ce dernier point au exemple irrecusable, et nous combattîmes l’opinion de Winckelmann qui, en expliquant les mots πιφου χαι αυτες οροφος, avoit pensé qu’il ne s’agissoit là que de tuiles de marbre. Il nous sembla qu’en disant que le temple étoit bâti en pierres ainsi que son comble, cela devoit signifier une voûte de pierre.
On ne doit pas se dissimuler, lorsqu’on connoît la disposition intérieure de la plupart des temples grecs, qu’il y eût eu beaucoup de difficulté, qu’il y eût eu même quelqu’impossibilité à les voûter, et à faire reposer une voûte en berceau sur les murs de leur cella, avec le peu d’épaisseur qu’on leur connoît et leur peu de contrefort ; qu’il eût été encore moins possible de l’établir sur les colonnes isolées des temples, dont l’intérieur avoit trois nefs et deux rangs de colonnes. Nous ignorions alors quelle étoit la disposition interne du temple de Phigalie, et quelles étoient ses dimensions. l’our accorder qu’il avoit une voûte eu pierre, il suffisoit de supposer une nef étroite et des murs fort épais.
Le plan bien connu maintenant de cet intérieur, vient lever toutes les difficultés, confirme la notion de Pausanias, et l’interprétation que nous en avions faite.
On y voit en effet : 1°. que la nef rétrécie par les deux rangées de colonnes adossées aux piédroits ne devoit guère avoir, ainsi que sa voûte, plus de quinze à vingt pieds de largeur ; 2°. que les colonnes avec les piédroits adossés aux murs présentoient un appui des plus solides ; 3°. que les murs, tels que le plan les présente, devoient avoir plus de trois pieds d’épaisseur.
Le temple de Phigalie ou d’Apollon épicurien renferme plusieurs autres particularités, qui deviendront d’un fort grand intérêt pour la critique de l’art et l’histoire et l’architecture, lorsque de nouveaux dessins mettront à portée d’en discuter les détails avec plus de précision.
La suite des bas-reliefs qu’on en a enlevés et qui sont aujourd’hui à Londres, se compose de tous sujets relatifs à la guerre des Centaures et à celle des Amazones. La composition et l’invention de la plupart de ces bas-reliefs offrent beaucoup d’action, une grande énergie de mouvemens, de la grandeur dans le style et souvent de la chaleur d’exécution. Le relief en est beaucoup plus saillant que celui de la frise du Parthénon, et l’on doit dire encore qu’il y règne moins de pureté, de correction et de fim. Plus d’un ciseau y a été employé, et à tout prendre, l’invention en est supéricure à l’exécution.
PHILÆ. C’est le nom d’une petite île située au milieu du Nil, ou dans un coude que fait ce fleuve, qui, dans cet endroit, a près d’une lieue de large. L’ile a 192 toises de long, 68 dans sa plus grande largeur, et 450 de circonférence. Le nom de Philæ, qui lui fut donné par les Grecs et les Romains, est tout-à-fait ignoré aujourd’hui dans le pays, où on lui donne un nom qui signifie l’île du Temple.
On y voit effectivement des restes assez considérables d’un grand temple, d’un autre plus petit, et de quelque autres constructions qui, sans doute, eu dépendoient.
L’ile étoit entourée jadis d’un mur de quai, dont on retrouve partout des vestiges, et dont plusieurs parties sont même encore bien conservées. Ce mur est en talus, bâti en grès. Les pierres en sont taillées avec soin, et en général il est d’une belle construction.
Plusieurs édifices servent d’avenue au grand temple. L’on peut consulter, sur leurs détails, la description de l’Egypte. Nous n’avons ici d’autre objet que d’indiquer les sources où l’on pourra puiser, sur ces ruines, des connoissances précises.
On sait assez que presque tous les temples de l’Egypte offrent une très-grande uniformité d’aspect, d’ordonnance extérieure et de ce qu’on appelle, en architecture, style et caractère. L’observateur y trouve toutefois dans leur disposition intérieure un assez grand nombre de variétés.
Ainsi le grand temple de Philæ présente dans la disposition de son portique une particularité remarquable, et qui ne se remarque une autre fois que dans un seul monument a Thèbes. Ce portique qui, comme tous les autres, est fermé latéralement, l’est encore antérieurement par un pylone, en sorte que la façade du temple n’est autre que celle de ce même pylone. Comme, par cette disposition, le portique, se trouveroit privé de lumière, on a laissé une grande ouverture dans le plafond, de manière que ce portique forme une espèce de cour environnée de colonnes de trois côtés.
Ce temple du reste est, comme tous les autres, une succession de pylones, de péristyles ou de cours formées par des colonnes.
Le portique dont on vient de parler a conservé assez fidèlement un exemple de la manière, dont la plupart des figures hiéroglyphiques étoient peintes. On y voit l’union de la peinture, de la sculpture et de l’architecture. Ce système de décoration fut beaucoup plus général qu’on ne pense dans toute l’antiquité.
L’île de Philæ renferme les restes d’un plus petit temple. La longueur totale de cet édifice est de treize toises. Les colonnes sous l’architrave n’ont que dix-sept pieds de haut. Les chapiteaux sont de formes et de décorations très variées. Ils sont distribués avec si peu de symétrie, qu’on seroit tenté de croire que l’architecte n’a pas été libre de faire autrement. Il y a de ces chapiteaux qui paroissent représenter des faisceaux de joncs ou de lotus ployés. Quant à la forme, il est difficile d’en trouver l’origine, et plus difficile encore de ne pas la trouver bizarre,