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une fois l’office de pont pour la traversée du golfe. Il ne faut pas croire cependant que le projet de Caligula ait jamais été de continuer cette levée dans la mer, pendant l’espace de quatre milles qui séparent en ligne droite la ville de Pouzzol, de celle de Baies. Suétone a si positivement raconté l’histoire du pont de Caligula, qui étoit un pont de vaisseaux, et non de matériaux solides en pierres, briques ou maçonnerie, qu’il n’est point permis de s’en faire une autre idée. Cet écrivain dit très-positivement que Caligula, dans une cérémonie, voulut traverser le golfe, un jour à cheval, et le lendemain dans un char ; qu’à cet effet, avec des vaisseaux chargés, arrêtés par des ancres et rapprochés les uns des autres, il fit établir une route sur le golfe dans la longueur de trois mille six cents pas environ, depuis Baies jusqu’au môle de Pouzzol. (Putelanas ad moles.)

Ces derniers mots indiquent bien que cette construction, indépendante du pont de vaisseaux, existoit auparavant et étoit un môle. Qui dira que ce môle ainsi avancé dans la mer, n’aura pas suggéré à Caligula l’idée de sa folle traversée ? Mais en même temps, qui ne voit que ce pont de vaisseaux très-constant, et qui n’eut rien que de fort praticable, s’alignant au môle en forme d’arcades de Pouzzol le fit réellement, dans cette marche de Caligula, servir de pont, et que le nom de pont de Caligula lui en sera resté ?

Le monument de Pouzzol le plus curieux pour l’architecture, est certainement le temple qu’on appelle, on ne sait pas pourquoi, de Serapis. Malheureusement ce temple fut, par l’effet de quelques-unes des catastrophes volcaniques qui se sont multipliées sur ces parages, presqu’entièrement comblé sous des cendres et des scories. Il ne fut découvert que vers la moitié du dernier siècle, et les colonnes et les débris qu’on en fit alors enlever, l’ont encore dénaturé de manière à en rendre la restitution difficile.

Au milieu d’une area quadrangulaire entourée de colonnes dont on retrouve encore les bases en place, et qui formoient un promenoir également carré, s’élevoit une partie circulaire ou colonnade à jour, formée par seize colonnes de marbre africain, au-devant de chacune desquelles il y avoit une statue. Les piédestaux de ces statues existent et sont encore à leur place. Au milieu du pavement de cette rotonde, on aperçoit un trou, sur lequel il y a une rosette de marbre à jour, par ou vraisemblablement s’écouloit le sang des victimes. Vis-à-vis l’entrée, et à la partie postérieure du quadrangle, sur lequel est inscrit le cercle du temple rond, s’élevoient quatre grandes colonnes, qui peut-être formèrent un péristyle en avant du sanctuaire. Il en reste encore trois sur pied.

On découvre sur ces trois grandes colonnes, et vers le milieu de leur fût, une particularité qu’on a quelque peine à expliquer. A la distance de dix pieds au-dessus de leur base, leur fût se trouve rongé dans une hauteur de quelques pouces par des pholades et dact lites, espèces de coquillages qu’on trouve encore dans les petits trous que l’animal a pratiqués. Au-dessus et au-dessous on n’en découvre plus le moindre vestige, dans toute la circonférence des trois colonnes. Comme les pholades se tiennent à la surface de la mer, qu’ils ne demeurent ni dans le fond ni dans les pierres au-dessus du niveau de l’eau, il s’ensuit que les parties corrodées et trouées de ces colonnes, ont dû se trouver pendant du temps au niveau de l’eau de la mer, qui aujourd’hui est de dix pieds plus basse que l’endroit de ces colonnes. Il faut donc supposer que ces colonnes, avant d’être employées et dressées dans ce temple, auront pu être enfouies à cette hauteur, et les nombreuses convulsions qui ont tant de fois bouleversé cette plage, si elles s’opposent à la recherche d’une explication positive, permettent toutes les conjectures qu’on voudra hasarder.

Autour de la colonnade quadrangulaire dont on a parlé, se voient encore un fort grand nombre de chambres carrées, qui étoient revêtues de marbre. Dans un des angles, il y en a une plus grande que les autres. Des bancs de marbre sont disposés alentour de chaque chambre : ils sont percés d’espace en espace, et ont une seconde ouverture dans la partie du devant et sous chacun des sièges. Tout porte à croire que ce temple (faussement dit de Serapis) aura été comme les temples d’Esculape, un de ces lieux mis sous la protection du dieu de la médecine, où des bains sulfureux, des eaux purgatives, réunissoient un grand nombre de malades.

Il seroit à désirer que des recherches faites avec soin dans toutes les parties du local de ce temple, si curieux à tant d’égards, nous missent à même d’en former, par une restitution bien autorises, une idée complète.

POUZZOLANE, s. f. C’est du nom de la ville de Pouzzol qu’a pris son nom une terre volcanique rougeâtre, dont on se sert dans une grande partie de l’Italie, et qu’on mêle, au lieu de sable, avec la chaux, pour en faire un mortier supérieur à tous ceux qu’on connoît, et qui a surtout la propriété de se durcir dans l’eau.

Quoiqu’on trouve de cette terre volcanique dans beaucoup d’autres parties de l’Italie, et surtout auprès de Rome, cependant nous voyons que Vitruve lui donnoit déjà le nom qu’elle porte aujourd’hui ; ce qui pourroit faire croire, ou qu’on l’employa d’abord dans les environs de Naples, ou qu’on avoit trouvé quelque supériorité à celle de Pouzzol.

La carrière d’où on la tire encore aujourd’hui à Pouzzol, est une des plus abondantes qu’il y ait aux environs de Naples ; et quant au débit qu’on peut en faire, elle a l’avantage de pouvoir être

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