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Ce furent effectivement de véritables monumens, que ces bûchers, dont l’histoire et les médailles nous ont conservé le souvenir et la forme, tant chez les Grecs que chez les Romains. Au mot Mausolée, nous avons fait voir que la pyra ou le bûcher, édifice temporaire, mais décoré de toutes les pompes de l’architecture, avoit dû servir de modèle à ces tombeaux somptueux, où toute la solidité, de la construction et la richesse de la décoration, rivalisèrent de dépense en Grèce et à Rome, Voyez Mausolée.

C’est ainsi qu’en tout genre, chez les Anciens, nous voyons l’ouvrage de tous les arts naître, comme d’un germe fécond, du principe élémentaire d’un premier besoin, d’un premier usage. Et comme, en Egypte, le petit monticule, élevé sur le corps mort, devint le type de la plus grande pyramide, de même la pyra, assemblage de bois, disposé pour la combustion du mort, se trouva converti insensiblement en un bûcher décoratif, à plusieurs étages, qui devoit bientôt devenir, par une conversion nouvelle en matière solide, un des plus magnifiques ouvrages de l’architecture.

Mais ce fut, comme il arrive toujours, progressivement et à l’aide du temps, que le simple bûcher se modifia, s’augmenta et s’embellit au point d’inspirer à l’art les transformations dont on a parlé. A défaut de notions relatives à cet objet, en Grèce, Pline nous a montré la progression dont on parle, dans quelques faits qui déposent du luxe, que les riches particuliers de Rome apportoient dans la construction de la pyra qui devoit consumer leurs corps. Il devoit appartenir ensuite aux empereurs de franchir toutes les bornes de la vanité des particuliers en ce genre.

Ce ne fut pas non plus dans les républiques de la Grèce, qu’ils trouvèrent les exemples et les modèles de ce genre de somptuosité. Là, où la dépense des funérailles et celle des tombeaux étoient limitées par les mœurs, autant que par les lois, il ne put y avoir lieu à ces excès de magnificence. Aussi voyons-nous que la pompe des bûchers et le luxe des grands tombeaux, qui en furent les dispendieuses copies, ne se rencontrent que dans les Etats monarchiques. Pausanias, en effet, ne cite aucun grand monument de sépulture en Grèce ; les deux plus considérables qu’il cût vus étoient hors de la Grèce, celui d’Hélène à Jérusalem, et le tombeau de Mausole, d’où les Romains, ajoute-t-il, donnèrent à leurs tombeaux le nom de mausolée.

En fait de pyra ou de bûcher décoratif, ce que l’histoire fait connoître de plus considérable, avant l’imitation qu’on en fit à Rome, pour les apothéoses des empereurs, c’est celui de Denis-l’Ancien, tyran de Syracuse, qui avoit été décrit par l’historien Timée, et celui d’Héphastion, le favori d’Alexandre, prodige de grandeur et de richesse, dont Diodore de Sicile nous a transmis un assez long détail, que nous avons rapporté au mot Mausolée. Voyez cet article.

PYRAMIDAL, adj. m. On appelle ainsi, en général, tout objet, et, dans l’architecture, tout édifice, tout monument qui se termine comme une pyramide, c’est-à-dire, en forme décroissante de bas en haut.

La forme pyramidale, ainsi définie, est extrêmement commune dans les constructions de tous les peuples. Cette forme, dictée par l’instinct comme par la raison, repose sur le principe évident de toute solidité, qui veut que le fort porte le foible. Or, la conséquence toute naturelle de ce principe est que, dans toute masse de construction, la forme diminue de volume et de circonférence, à mesure de son élévation. J’ai dit que l’instinct seul inspiroit cette disposition. Et en effet, la nature elle-même s’oppose à la disposition contraire, pour peu qu’on porte un ouvrage quelconque à une certaine hauteur. On peut faire en petit des porte-à-faux ; on peut, comme dans des trompes, dissimuler le point d’appui, parce que l’ouvrage, au lieu d’être isolé, se trouve lié à la masse qui lui sert de soutien. Mais tout ouvrage de bâtisse isolé ne sauroit subsister dans la disposition inverse de la forme pyramidale, c’est-à-dire, ayant pour sommet ce qui devroit être sa base. De quelque façon qu’on parvînt à réaliser ce tour de force, l’œil et le sentiment n’en seroient pas moins offensés, parce qu’avant tout, on veut de la solidité, et on la veut non-seulement réelle, mais apparente.

Il ne faut pas aller chercher ailleurs la raison du plaisir que nous font les formes pyramidales, dans les conceptions et les compositions des édifices. Tout ce qui est conforme à la nature des choses, l’est aussi à la nature de nos sensations. Ainsi, tout ce qui est fondé en raison nous plaît, précisément parce que nous sommes doués de la raison, et parce que ce qu’on appelle instinct, chez le plus grand nombre, n’est autre chose qu’une raison non développée, comme la raison n’est, en beaucoup de choses, que l’instinct perfectionné.

L’instinct et la raison ont donc inspiré, dans les ouvrages de l’art de bâtir chez tous les peuples, cette disposition qui produit la décroissance de bas eu haut des formes et des masses, et la produit d’autant plus sensible, que ces masses auront plus d’élévation.

C’est, comme nous le dirons dans l’article suivant, à l’efiet d’obtenir la plus grande durée dans les monumens funéraires ou les tombeaux, que les Egyptiens firent de leurs masses ce qu’on a appelé des pyramides. La même raison de solidité et de durée, a fait donner la même forme, dans la Chine et dans l’Inde, aux tours, aux kiosques, aux minarets, aux pagodes ; chez les Grecs et les