certains pilastres en gaîne, objets eux-mêmes de caprice et de mauvais goût.
RUDÉRATION, s. f. Vitruve appelle de ce nom, une maçonnerie assez grossière, qu’on nomme aujourd’hui hourdage. On l’employoit jadis particuliérement aux aires des planchers et de pavemens. Voyez le mot Aire.
Rudération, en latin ruderatio, Vient du mot rudus.
RUDUS est le mot latin employé par Vitruve, pour exprimer les sortes de matériaux, platras ou pierrailles, avec quoi se faisoit le second massif des aires antiques.
RUE, s. f. Nom qu’on donne, dans les villes, à l’espace de terrain, qui reste libre pour la voie publique, entre les maisons on les bâtimens qui les bordent des deux côtés.
Une ville est un composé de bâtimens, de rues, et de places publiques. Au mot Place, nous avons déjà eu l’occasion de faire observer, que la beauté des places et des rues est ce qui contribue le plus à celle des villes, mais que malheureusement, chez les Modernes, surtout, il s’est donné peu d’occasions de les établir sur des plans réguliers, fixés d’avance, et propres à leur procurer des percés réguliers et des rues symétriques. Nous voyons, dans l’antiquité, beaucoup de villes se former par des fondations nouvelles de colonies, qui s’établissant par choix, ou par force, sur des terrains libres, procédoient à leur distribution, avec ordre et intelligence. On commençoit par tracer le plan de l’enceinte et des murs qui dévoient la borner ; on determinoit ses expositions, on fixoit le nombre et la position de ses portes. De sa pouvoient résulter de ces directions générales, qui, mises en rapport avec les principaux monumens, commandés par le besoin et par l’usage, étoient de nature à faciliter des communications heureuses entre les rues, et à leur procurer la régularité qu’on cherche souvent en vain à y introduire après coup.
Peu de villes modernes ont eu de semblables commencemens. On peut dire que presque toutes, grandes, moyennes ou petites, sont nées d’un certain ordre de causes qu’on ne peut pas toujours appeler fortuites, parce que, presque partout, la nature a destiné certaines positions à recevoir des rassemblemens de maisons. Mais ce qu’on peut affirmer, c’est que le hasard seul a presidé aux premières directions des masses de bâtimens ou de maisons, et aux espaces laissés entr’elles, pour y former la voie publique. C’est surtout quand on étudie, dans la topographie d’une grande ville, l’histoire de ses agrandissemens successifs, qu’un aperçoit bien clairement ces effets du hasard. Dès qu’une position heureuse a commencé à former un agrégat de maisons et de rues déjà plantées ou alignées sans ordre, mais auquel on peut donner le nom de ville, on voit se bâtir et s’établir à l’entour, de toutes parts, des habitations isolées ou des groupes de maisons qui deviendront un jour des appendices, de la ville, et puis ses faubourgs. En effet, de ces villages à la ville, se forment peu à peu, par des, bâtisses intermédiaires, des espèces de liaisons qui finissent par être des rues, et enfin des rues centrales, à mesure que la ville augmente sa circonférence. Dès-lors, comme ou voit, le hasard seul des localités, a dirigé avec plus ou moins de rectitude ou de circuit, les lignes qui donnent aux rues leur configuration.
Ce n’est que bien long-temps après, et lors-qu’un véritable redressement, un élargissement général ne peut plus avoir lieu, qu’on procède par degrés à ces améliorations Mais il arrive aussi que l’accroissement de population et de richesse, sollicitant de nouveaux agrandissemens, de nouveaux quartiers se construisent sur des plans arrêtés d’avance, et alors les rues qui s’y pratiquent, soumises aux condition imposées aux constructeurs, deviennent les plus belles de la ville.
On fait consister ordinairement la beauté des rues dans leur largeur et dans leur alignement. Sous ce rapport, il n’y a point de villes qui aient de plus belles rues que Turin et Londres. La première, parce qu’elle est de nouvelle construction ; la seconde, parce qu’après le grand incendie de 1689, elle fut toute rebâtie sur des alignemens donnés. On voit, dans cette ville, des rues de plusieurs milles de long, telle que la rue d’Oxford, et d’une largeur proportionnée. Berlin et Saint-Pétersbourg sont des villes récentes, et qui, par celle raison, n’ont point en à réparer les fautes du hasard, et les irrégularités d’une formation successive à travers les siècles : aussi admire-t-on la grandeur et l’alignement de leurs rues.
L’antique Rome étoit fort loin de jouir de cet avantage. Ses rues, percées par des causes spontanées, étoient généralement tortueuses. Probablement l’incendie de Néron aura donné lieu d’en redresser et d’en régulariser plus d’un quartier. La Rome moderne est, sans doute, redevable a l’ancienne de quelques grandes et belles ouvertures de rues, dont on aura suivi les directions dans les nouvelles constructions. On doit citer les trois grandes rues formant ce qu’on appelle patte d’oie, et qui aboutissent à la porte del Popolo, les quatre grandes rues qui se traversent en croix aux quatro fontane, la rue Giulia, la rue de la Longara, etc.
Une ville très-remarquable, et peut-être la plus remarquable de toutes celles qu’on connoît, est la capitale de la Sicile, Palerme, dont le plan général consiste de même en quatre rues, faisant une croix, à quatre croisillons égaux, et qui, cou-