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TAB

TABERNA. Ce mot, dont sur un fait taverne en français, étoit Celui Dont sur soi servoit à Rome, pour exprimer ce que nous appelons généralement boutique. On nommoit tabernœ argentariœ, les boutiques des banquiers, que Tarquin l’Ancien fit construire autour du Forum. Les comédies appelées Tabernariœ, le furent ainsi, parce que les sujets étoient pris dans la classe des gens à boutiques, ou parce que la scène représentoit les demeures des gens du peuple. Pauperum Tabernas, a dit Horace, par opposition à Regumque turres.

TABERNACLE, s. m. , en latin tabernaculum, qui vient de taberna, pauvre et misérable maison, ainsi appelée de tabula, planche, parce que la taberna n’étoit qu’un très-chétif assemblage de bois. Le même mot signifie particulièrement tente, par cela que dans les camps, la tente se composoit nécessairement de matériaux légers et assemblés à la hâte.

Ainsi traduit-on généralement tabernaculum par tente, et c’est l’équivalent de ce mot en hébreu, que la Vulgate a rendu par le mot tabernaculum. Les Israélites, comme l’on sait, habitèrent long-temps sous la tente, ainsi que le font encore aujourd’hui les Arabes et tous les peuples nomades ou pasteurs, et ils en conservèrent l’usage, jusqu’à la construction du temple de Jérusalem. Ils appelèrenttabernacle par excellence, l’espèce de tente portative, faite de planches de bois de cèdre, qu’ils dressoient dans chaque endroit du désert où ils campoient. Cette tente qui leur servoit de temple mobile, renfermoit les tables de la loi, les vases sacrés, tout ce qui formoit les symboles révérés du culte du vrai Dieu. Dans la suite, ces objets furent renfermés dans ce qu’on appeloit l’arche sainte, placée dans le lieu le plus retiré du temple, et qui porta, par tradition, le nom de tente ou tabernacle.

La religion chrétienne a emprunté à la judaïque cette dénomination, qu’elle applique aussi au lieu qui renferme ce qu’il y a de plus révéré et de plus auguste, c’est-à-dire le saint sacrement, et les vases consacrés. Dans les premières églises, le tabernacle avoit eu encore une ressemblance avec celui dont le christianisme a pris le nom. Elle consistoit dans les draperies qui servirent de voiles au saint des saints : et de là la disposition de l’ancien ciborium, formé de quatre colonnes, et d’une petite coupole, avec des rideaux tout alentour, qui, selon les circonstances, le cachoient à la vue. Nous avons fait voir au mot BALDAQUIN, que là est l’origine de cette moderne construction,


que l’on a souvent élevée au-dessus du tabernacle et de l’autel. Voyez BALDAQUIN.

Aujourd’hui, selon l’usage, et selon l’acception donnée à ce qu’on appelle tabernacle, sur l’autel chrétien, ce mot désigne un ouvrage soit de menuiserie, soit de marbrerie, soit de métal ou d’orsévrerie, auquel on applique différentes, formes, mais le plus souvent celle d’un petit édifice, avec une porte qui donne entrée à l’espace où l’on renferme le ciboire, avec les hosties consacrées.

L’art a donné toutes sortes de formes aux tabernacles, et ces formes ont aussi suivi le cours des variétés de goût, que ne cessent d’éprouver les meubles et les édifices. Naturellement, en ne considérant que l’emploi matériel du tabernacle, sur l’autel chrétien, on ne l’a que trop souvent configuré sous l’apparence d’armoire, et alors on lui a donné le caractère vulgaire de meuble. La richesse des matières a, si l’on veut, ennobli souvent dans l’opinion, ce que cette forme offre de commun ; mais le style noble ou trivial est, là comme ailleurs, tout-à-fait indépendant du prix matériel, et de la dépense du travail.

Il nous semble qu’il y a des formes qui, toutes seules, ont la propriété de produire dans l’esprit l’idée de noblesse, de sainteté, de vénération. Telle est la forme de temple. C’est donc celle qui doit le mieux convenir au tabernacle, et il est vrai, comme on l’a déjà dit, qu’on l’y a souvent affectée.

D’après ce type, le tabernacle représenteroit une œdicula. Si la position de l’autel étoit adossée, ce petit temple y seroit élevé et disposé de manière à ne présenter qu’une façade d’édifice. Pour les autels isolés ou vus de toutes parts, l’artiste trouveroit dans l’imitation de toutes les sortes de temples quadrangulaires, circulaires, ou à pans coupés, de quoi satisfaire à toutes les convenances d’aspect que le sujet exige.

On ne prétend pas, au reste, limiter à un seul genre de forme ou de décoration, la composition du tabernacle. Il y a beaucoup rie motifs ingénieux qui dépendent de l’art du sculpteur, et qui peuvent très-heureusement s’appliquer à ce sujet, et l’on pourroit citer quelques-unes de ces compositions, où le tabernacle se trouve fort heureusement accompagné par des anges adorateurs.

On a souvent aussi donné à la masse générale du tabernacle, la forme d’une niche surmontée d’un fronton que supportent des colonnes, et de là est certainement venue la dénomination de niche en tabernacle qui entre dans le vocabulaire de l’architecture. Voyez NICHE.