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Page:Encyclopédie méthodique - Architecture, T3.djvu/56

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ORD ORD


parti dans chaque partie, comme dans le tout, et avec la même économie.

Ce qu’on vient de dire sur la propriété caractéristique des trois ordres grecs, et sur l’espèce de qualité dont chacun offre l’expression, doit démontrer quelle fut et quelle sera toujours l’erreur de ceux, qui ont tenté ou qui tenteront encore l’invention de nouveaux ordres. Cette erreur provient du faux point de vue sous lequel on est porté à considérer les genres de colonnes qu’on appelle ordres, et les genres d’ordonnances qui en résultent.

Il a déjà été observé qu’il y a trois choses fort distinctes dans les trois ordres grecs : leur forme, leur ornement et leur proportion. Chacun des trois se distingue des deux autres dans chacun de ces trois objets : or, il y a déjà une grande méprise à prétendre inventer un ordre nouveau, par le changement d’une seule de ces trois choses ; car si l’on ne fait que changer la forme, sans changer l’ornement, ou l’ornement sans la forme, ou l’un et l’autre, sans la proportion, on n’aura rien fait de nouveau ; on n’aura produit que de l’inconséquence et du disparate, puisque ces trois choses se sont nécessaires l’une à l’autre, et dépendent d’une raison commune qui les a unies, non pas arbitrairement, mais en verte du principe général de l’harmonie.

Car l’invention des ordres grecs tient moins qu’on ne pense, aux types de leurs formes apparentes. Les Grecs, dans le fait, n’ont point inventé d’ordre, ils ont seulement reconnu qu’en architecture, comme dans tout le reste, il y avoit le plus, le moins et le point milieu entre les deux ; puisque les édifices, qu’on le sache ou qu’on ne le sache pas, qu’on le veuille ou non, exprimeront toujours, dans leurs apparences, le plus ou le moins de solidité, de gravité, de simplicité ou de légèreté, d’agrément ou de variété.

Comme, entre ce plus et ce moins, il ne peut pas ne point y avoir un terme moyen qui réunisse dans un degré quelconque ces qualités opposées, les Grecs n’ont fait autre chose que fixer ces trois termes ; dans le dorique, par les caractères qui donnent la plus juste idée, de supports solides, d’ornemens graves, de proportions courtes ; dans l corinthien, par les formes les plus élégantes, la décoration la plus riche, la proportion la plus svelte ; dans l’ordre moyen ou ionique, par l’emploi moyen de formes, d’ornemens et de proportions également éloignées de la simplicité du l’un et de la richesse de l’autre.

Dès-lors il ne dépend pas du caprice, de transposer les propriétés de chaque ordre, sans désassortir ce que le simple bon sens réunit : car chacune de ces trois choses, forme, ornement et proportion, étant au jugement seul des yeux, et de l’instinct le plus ordinaire, dans une corrélation nécessaire avec les deux autres, ce seroit contrarier la nature même des choses, que mettre ce qu’il y a de plus riche, sur ce qu’il y a de plus pauvre, et réciproquement.

Voilà le principe élémentaire des ordres. Ce qui nu signifie pas qu’il soit et doive être contre nature, de donner à l’ordre solide un autre chapiteau que le dorique, ou à l’ordre élégant un autre chapiteau que le corinthien. Rien, sans doute, en théorie générale, ne s’y opposera, pourvu que, dans chacun de ces ordres, le chapiteau nouveau corresponde au caractère le plus simple dans l’un, et le plus riche dans l’autre. De fait plus d’une variété a eu lieu en ce genre, surtout à l’égard du corinthien, et si elles ont rarement obtenu du succès, c’est que ces nouveautés ne se sont fait remarquer, que par mi excès qui n’ajoutoit rien à l’expression du caractère donné, soit parce qu’elles restoient en deçà, soit parce qu’elles alloient au-delà.

Tel a été ordinairement le sort d’inventions prétendues, dont les auteurs n’inventoient rien, et ne pouvoient rien inventer : car on ne trouve rien hors de la loi de nature, et cette loi ayant été une fois découverte par le génie de l’art dans les trois combinaisons qu’on a développées, il ne reste plus d’autre conquête à l’esprit d’innovation, que par la bizarrerie, c’est-à-dire, le désordre.

Mais la plus ignorante de toutes les prétentions a été celle de croire inventer un ordre nouveau, par quelque changement de feuilles ou de symboles dans un chapiteau. Qu’on substitue à l’acanthe ou au laurier, la feuille du chêne, la fleur du lys, tel ou tel autre symbole, rien ne l’empêche, et une multitude de ces variantes se voient dans l’antique. Eh bien l’on aura fait, non pas un chapiteau nouveau, mais un nouvel ornement de chapiteau, encore moins un ordre nouveau : car l’ordre ne tient pas plus à cela, que la proportion de la figure humaine ou de sa tête ne tient à l’habit ou à la coiffure.

Nous avons déjà énoncé plusieurs de ces considérations aux mots sous lesquels se trouvent décrits les trois ordres grecs, et nous n’alongerons pas cet article de nouvelles notions à leur égard. Pour se conformer à l’usage des dictionnaires, qui d’après les nomenclatures reçues ont multiplié sans aucune raison les noms des ordres, nous nous contenterons de placer ici leurs simples désignations.

Ordre attique. Voyez au mot Attique. ce qu’il faut entendre par-là.

Ordre caryatide. Voyez au mot Caryatide. ce que fut ce prétendu ordre.

Ordre composé. Voyez à ce mot ce qu’on a dit de cette variété de l’ordre corinthien,

Ordre corinthien. Voyez Corinthien.

Ordre ionique. Voyez Ionique.


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