entrer ces objets dans la classe des ornemens dont s’embellissent l’intérieur ou l’extérienr des édifices, et, si l’on veut encore, sous le point de vue de la beauté que l’art t le goût peuvent leur donner.
Cette dernière considération a déjà occupé la critique de quelques écrivains admirateurs de l’antiquité, qui se sont plu à saire remarquer, dans cette classe bien subalterne des ouvrages des Grecs, le même sentiment du beau, le même principe de vérité, de pureté et d’élégante simplicité, qui distinguent les plus grands monumens de leurs arts. Ils ont reconnu qu’eu général, leurs artistes, en ce genre, avoient en soin de donner à chaque espèce de vases on d’ustensiles, la sorme tout à la sois la mieux appropriée à leur destination, et la plus agréable à l’œil. Quelquesois on prenoit pour base le parallépipède, parce que l’œil saisit avec facilité cette forme. Dans d’autres vases, on adoptoit la ligne circulaire bombée, ou légèrement évidée. Dans tous, le principe étoit d’éviter les sormes rompues, les parties angulaires, et toute espèce de duplicité de contour.
Généralement on pourroit ramener à un sort petit nombre de sormes élémentaires et primitives, la configuration des vases antiques. Cependant on ne sauroit compter toutes les variétés que les Anciens surent imprimer à ces objets, sans y employer de mélanges, ni de diversités compliquées. On ne sauroit dire en combien de manières ils en modifièrent les ornemens, sans altérer leur type, avec quel art ils savoient saire sortir, de la nécessité même, le motif de leurs embellissemens.
Quand nous parlons, sous le rapport de l’art et du goût, des vases antiques, nous ne prétendons pas exclure les vases qui servirent aux besoins domestiques. Les découvertes d’une multitude d’ustensiles usuels, qu’ont reproduits dans toute leur intégrité, les souilles d’Herculanum et de Pompeia, ont prouvé qu’un même esprit répandu dans tous les ateliers, présidoit à la sorme des objets les plus communs en ce genre, comme à la composition des plus grands et des plus riches.
Mais il saut dire, qu’en aucun temps, et chez aucun peuple, le luxe des vases ne fut porté à un aussi haut degré de profusion, de variété, de recherche et de magnificence. Plus d’une cause, liée aux usages de la vie civile, aux habitudes politiques, et aux pratiques religieuses, en multiplia l’emploi. Les vases, sous le nom de vaisselle que nous leur donnerions aujourd’hui, sirent le plus riche ornement des tables et des sestins. C’étoit par leur nombre, c’étoit par la rareté de leur matière, par l’élégance et la cherté de leur travail, que les grands et les riches cherchoient le plus à se distinguer. On en faisoit l’ornement de ces abaques, ou buffets, qu’on ouvroit et exposoit, comme objets d’ostentation, dans les lêtes, à la curiosité publique. Les vases étoient
matière à présens dans les rapports politiques des Etats. L’histoire est remplie des mentions de genre de libéralité, surtout envers les dieux. Nul genre d’offrandes ne fut plus commun, et les conquêtes et les rapines des Romains, en firent refluer à Rome, de toutes les parties du Monde alors connu, une immense quantité.
Il n’y a réellement aucune espèce de comparaison à faire, sur ce point, entre le luxe du paganisme et celui du christianisme. Les pratiques religieuses des Anciens étoient à la sois publiques et particulières. Chacun avoit dans sa maison un lararium, et y déposoit aussi beaucoup de ces ex voto, qu’une pieuse crédulité multiplioit a l’infini. On croit, ou du moins on soupçonne, que ces vases qui, selon l’usage le plus général, accompagnoient le mort dans son tombeau, avoient pu, pendant sa vie, orner son oratoire domestique. Mais jamais source ne fut plus séconde emplois de vases de toute espèce, que l’usage des sacrifices, dont une grande partie consistoit en ablutions, en libations, en effusions de liquide. Ainsi les opisthodomes des temples, devenus, comme l’on sait, les trésors, où se conservoient les richesses religieuses, durent aussi devenir des collections de tous les chefs-d’œuvre de la plastique et de la toreutique, en sait de vases, et c’étoit à ces ouvrages qu’on appliquoit les matières les plus rares, les plus riches métaux. Tous ces brillans objets ont péri ; il ne s’est pas retrouvé, comme on peut le eroire, un seul vase d’or, à peine quelques-uns en argent. Le bronze a moins tenté la cupidité, et les cabinets en possèdent un assez grand nombre. C’est l’argile, la matière la plus fragile, qui nous a transmis une quantité innombrable de modèles de vases, et cette singularité est due à la découverte d’un nombre prodigieux de sépultures qui, dérobées depuis des siècles à toutes les investigations, ont conservé, et restituent tous les jours, les vases de terre cuite peinte, ensevelis avec les morts.
Outre ce que les peintures de ces vases offrent de précieux à l’art et à l’archéologie, on peut encore en tirer des renseignemens relatifs aux variétés de sormes, sur lesquelles s’étoit autresois exercé le goût de l’art grec. Tel est le nombre, aujourd’hui infini, de ces objets do toute sorte de dimensions, qu’il est à présumer, que celui qui voudroit s’exercer à reproduire toutes les variétés des sormes devases chez les Anciens, ne pourroit manquer do retrouver, dans une si vaste collection, l’universalité des types de tous ceux qu’on a perdus, comme encore de ceux que la sculpture en marbre nous a conservés. Mais je sortirois par trop de l’objet de cet article, si j’essayois même d’effleurer cette analyse.
Je ne dois, comme je l’ai dit en commençant, considérer l’emploi des vases que sous le rapport des ornemens qu’ils procurent aux monumens. Chez les Anciens, le vase, envisagé comme urne