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Page:Encyclopédie méthodique - Architecture, T3.djvu/58

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de l’exécution matérielle, que de la sculpture. C’est au travail mécanique du ciseau, qu’elle est redevable des formes qui lui donnent l’existence. Mais outre ce qu’il y a de purement mécanique dans ce qui regarde, soit la taille des pierres, soit l’élaboration des autres matières, c’est encore à l’art de la sculpture qu’il faut rapporter les travaux plus on moins difficiles, plus ou moins délicats, qui rachèvent, si l’on peut dire, l‘impression des signes variés, qui deviennent le complément de son écriture, et la rendent de plus en plus intelligible aux yeux et à l’esprit. Ces nuances plus ou moins légères, c’est l’ornement qui les rend sensibles.

Ainsi chaque genre d’ordre a ses ornemens, dont le caractère correspond au caractère de ses formes. Tout le monde sait que l’ordre qui exprime la force et la simplicité, le dorique, admet dans les cannelures des colonnes, dans les contours du chapiteau, dans les triglyphès et les métopes de la frise, dans les mutules et les profils de la corniche, des parties d’ornemens qui participent du type général, et des proportions graves et sévères de l’ordre.

L’ionique, ordre moyen par ses proportions, ses formes et le genre de sa modénature, entre le dorique et le corinthien, admet dans ses cannelures, dans sa base, dans son chapiteau, dans les profils de son entablement, plus d’ornemens, de plus légers et de plus variés. Le corinthien, par l’emploi le plus abondant, le plus diversifié de tous les détails d’ornemens, sur sa base, son fût, son chapiteau et toutes les parties de son ordonnance, sait établir entre ses proportions et ses formes, cet accord qui lui donne la propriété d’exprimer les qualités de magnificence, de richesse, de légèreté, etc. On sait que ceux qui ont voulu porter encore plus loin cette expression, ne l’ont fait dans le prétendu ordre appelé composite, qu’en chargeant davantage de détails d’ornemens, tous les membres de l’ordre corinthien qui peuvent les admettre, en faisant enfin qu’il n’y ait plus une seule partie lisse.

Tout le monde connoît, au moins d’une manière générale, les principaux ornemens, dont la sculpture décore les membres de l’architecture. Il suffira de citer ici les noms des denticules, des oves, des feuilles d’eau, des chapelets, des perles., des palmettes, des rinceaux, des tigettes, des caulicoles, des volutes, des acanthes, des enroulemens, que le goût de l’architecte distribue diversement, dans chaque mode d’ordonnance. Nous ne décrirons pas ici ces détails, dont les noms forment tous la matière de quelqu’article particulier, auquel nous renvoyons le lecteur. Nous n’avons rappelé cette nomenclature, que pour bien fixer l’idée de ce qu’on appelle spécialement ornement, dans l’exécution de l’architecture.

Nous ne nous arrêterons pas non plus sur l’origine ou l’espèce d’étymologie de chacune de ces sortes de caractères. Nous l’avons indiquée plus d’une fois, et nous on avons montré la source, tantôt dans les analogies que le hasard a fournies à l’artiste, des plantes naturelles adhérentes aux édifices, tantôt dans les pratiques empruntées aux parures des semmes, tantôt dans l’emploi des offrandes faites aux lieux saints, tantôt dans les usages de l’allégorie, tantôt encore dans cette habitude d’orner, qui est un des instincts de l’homme.

Nous nous bornerons ici à parler de l’ornement, comme étant simplement, dans les mains de l’artiste, un moyen d’ajouter une signification plus claire, à celle du caractère déjà établi dans un édifice, par son style, ses formes et ses proportions.

Le premier point à observer, est leur distribution. Ce mot renferme avant tout l’idée qu’on doit se faire de la mesure d’ornement qui convient ou à chaque ordre, ou dans les édifices du même ordre, au caractère qu’il s’agit d’y exprimer, car (ainsi qu’on l’a vu à l’article Ordre) chaque ordre est dans l’échelle des variétés de l’architecture, une couleur principale, qui peut fournir, selon l’emploi qu’on en fait, des nuances et des tons variés.

Ainsi le dorique, dont le caractère est la force et la simplicité, pouvant, par les variétés de proportion qu’il comporte, manifester plus ou moins ces deux qualités, l’architecte pourra, selon l’un et l’autre cas, distribuer dans quelques membres de cette ordonnance, un certain nombre d’ornemens qui la fera participer au caractère de l’ionique. On peut citer des chapiteaux de l’ancien dorique grec, où de pareilles légèretés sont introduites dans les filets de son collario. Des ornemens plus significatifs encore trouvent place dans les espaces des métopes, et des palmettes sont taillées aux acrotères du temple dorique de Minerve à Athènes. Remarquons aussi que la proportion de ce dorique a quelque chose de plus élégant que celle du plus grand nombre d’édifices de cet ordre considéré selon l’ancien système grec. Depuis, le dorique alongé par les modernes, a reçu même des oves dans l’échine découpée de son chapiteau, et des profils ou des filets dans son tailloir.

Le second objet d’observation par rapport à l’emploi des ornemens, est le choix de leurs différentes espèces. Comme le plus ou le moins dans leur distribution, contribue à l’expression du degré de simplicité, d’élégance et de richesse, le mode de chaque espèce d’ornement a aussi la propriété de se prêter à cette expression, de la renforcer, de la rendre sensible aux yeux et à l’esprit.

Dans ce grand nombre d’objets que la sculpture sait approprier aux formes et aux membres de l’architecture, il en est dont l’imitation produit des effets sérieux ou gais, simples ou variés, gracieux ou sévères, et déjà, comme on le voit, chaque ordre, selon son caractère, s’est approprié