Page:Encyclopédie méthodique - Arts Académiques.djvu/120

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
GAL GAL109

mité antérieure, des mouvements dont l’appréciation même la plus vraie ne détermine rien de positif, relativement à ceux du bipède postérieur auquel les yeux du cavalier ne peuvent atteindre. Il faut avouer cependant que ces diverses réactions sont tantôt plus foibles, & tantôt plus fortes ; elles sont moins sensibles de la part des chevaux qui ont beaucoup d’union, de légèreté, & une grande agilité de hanches ; elles sont plus marquées de la part de ceux dont les battues sont étendues, peu promptes & abandonnées ; mais l’habitude d’une exécution réfléchie sur les uns & sur les autres, ne peut que les rendre également familières. II est encore des circonstances où elles nous induisent en erreur ; un instant suffit alors pour nous détromper. Que l’animal jette, par exemple, la croupe hors la volte, l’effet que le premier temps produira sur nous, sera le même que celui qui nous avertit que le cheval est faux, & nous serons obligés d’attendre le second pour en décider, parce que dans ce même second temps, les hanches étant dèja dehors, & l’animal continuant à galoper déterminément, dès qu’il est demeuré juste, nous n’appercevons aucun changement dans notre assiette.

Quoi qu’il en soit, & à quelque étude qu’on se livre pour acquérir cette faculté nécessaire de percevoir & de sentir, il est de plus absolument essentiel de s’attacher à celle de la nature du cheval qu’on travaille. Les dérèglements de l’animal dans l’action dont il s’agit, comme dans toutes les autres, proviennent en général & le plus souvent de la faute des maîtres qui l’y exercent inconsidérément & trop tôt, ou du peu d’assurance du cavalier, dont l’irrésolution de la main & l’incertitude des jambes & du corps occasionnent ses désordres : mais il est certain que les voies dont il se sert pour se désunir & pour falsifier, sont toujours relatives à sa conformation, à son inclination, à son plus ou moins de vigueur, de souplesse, de légèreté, de finesse, de volonté, d’obéissance & de courage. Un cheval chargé d’épaules & de tête, ou bas du devant, falsifiera ou se désunira en s’appuyant sur la main & en chaussant le derrière. Un cheval long de corps, en s’allongeant davantage, pour diminuer la peine qu’il a à rassembler ses forces & à s’unir ; un cheval foible de reins, en mollissant & en ralentissant son mouvement ; un cheval qui a beaucoup de nerf & de légèreté, en se portant subitement en avant ; un cheval qui a du courage & de l’ardeur, en augmentant encore plus considérablement la véhémence de son allure ; un cheval entier ou moins-libre à une main qu’à l’autre, en portant la croupe en dedans ; un cheval qui tient du ramingue, en la portant en dehors ; un cheval qui joue vivement des hanches & qui est fort nerveux d’échine, en la jettant tantôt d’un côté & tantôt d’un autre ; un cheval d’une grande union, en se retenant & en se rassemblant de lui-même, &c. Or comment, si on n’est pas en état de suivre & d’observer toutes ces variations, faire un choix prudent & éclairé des moyens qu’il convient d’employer pour le remettre ? Il est des chevaux tellement fins, sensibles, que le mouvement le plus léger & le plus imperceptible porte atteinte à l’ordre dans lequel leur progression s’effectue. Si les aides qui tendent à les faire reprendre, ne sont administrées avec une précision & une subtilité inexprimables, elles ne servent qu’à en augmenter le trouble, & on est contraint de les faire passer à une action plus lente, & même quelquefois de les arrêter pour les repartir. Il en est encore qui falsifient quelques instants, & qui reviennent d’eux-mêmes à la justesse ; on doit continuer à les galoper sans aucune aide violente ; & comme ils pèchent par trop d’union, ils demandent à être étendus dans les commencements, & à être ramenés ensuite & insensiblement à une allure soutenue & plus écoutée. Nous en voyons dont l’action n’est telle qu’elle doit être qu’autant que nous les en voyons échappés, parce que, constitués par la falsification dans un défaut réel d’équilibre, ils ressentent dans la course une peine encore plus grande que dans la battue d’un galop ordinaire, & que la fatigue qu’ils éprouvent, les oblige à chercher dans la succession harmonique & naturelle de leurs mouvements, l’aisance & la sureté qui leur manquent : c’est ce que nous remarquons dans le plus grand nombre des chevaux qui galopent faux par le droit & aux passades ; ils reprennent sans y être invites aussitôt qu’ils entrent sur la volte & qu’ils l’entament. Quelques-uns au contraire, & qui ne sont point confirmés, deviennent faux lorsqu’on les échappe. Plusieurs ne se rejettent sur le mauvais pied & ne se désunissent, que parce qu’ils jouissent d’une grande liberté. En un mot, il est une foule & une multitude de causes, d’effets, d’exceptions & de cas particuliers, que le véritable maître a seul le droit de discerner, & qui ne frappent point la plupart des hommes vains qui s’arrogent ce titre, parce qu’il en est peu qui aient une notion même légère des difficultés qu’il faut vaincre pour le mériter.

Dans l’impossibilité où nous sommes de nous abandonner à toutes les idées qui s’offrent à nous, nous simplifierons les objets, & nous nous contenterons de tracer ici en peu de mots des règles sures & générales, 1°. pour maintenir le cheval dans la justesse de son allure, 2°. pour l’y rappeller.

Il est incontestable en premier lieu, que l’action de falsifier & de se désunir est toujours précédée dans l’animal d’un temps quelconque, qui en altère plus ou moins imperceptiblement la cadence, ou qui change en quelque manière & plus ou moins sensiblement la direction de son corps ; sans ce temps quelconque, il seroit dans l’impuissance absolue & totale de fausser sa battue, & son allure seroit infailliblement & constamment fournie dans une même suite & un même ordre de mouvement. Or, ce principe étant certain & connu, pour-