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une fosse, ou en monticule l'herbe en dessous, fait un excellent engrais.

Les feuilles ramassées & pourries en tas sont bonnes pour les fleurs, panais, carottes, oignons & choux ; on les étend sur la superficie des planches, après avoir semé & planté.

On fait un excellent engrais avec les fleurs fannées, les herbages & leurs montants, les tontures des charmilles, les bourgeons jetés au palissage, les issues de cuisine, (tripailles & autres chûtes) & toutes sortes de balayures de maison ; on fait pourrir le tout dans une fosse, où il se convertit en terreau.

Les boues de ville & de chemin consommées au moins pendant un an, & passées à la claie.

Les terres neuves des bas prés, celles des taupinières, celles enlevées dans les cours des fermiers, dans les carrefours des villages sont excellentes pour renouveller celles du pied des arbres, remonter un jardin, & sur-tout pour changer les terres nitreuses, salpêtreuses, dont le fond est de grouîne.

La marne est un engrais qu'il faut laisser aux laboureurs.

Parmi les fumiers, celui de cheval a la préférence, excepté dans les terres trop chaudes, où il ne faut l’employer que très-consommé ; on préfère alors celui de vache, quoique moins substantiel.

On se sert de fumier de vache mêlé avec deux tiers de terre neuve pour renouveller un terrain sec & maigre.

Il est nécessaire de renouveller & de remonter un potager quand la terre est effritée, que les productions sont extrêmement maigres & chétives ; ou bien, quand un jardin, pour avoir été trop engraissé par des fumiers, produit à la vérité belles plantes, mais sans goût & sans faveur ; c'est à quoi le commun des jardiniers ne prend pas garde.

On fait cette opération avec des terres neuves que l’on mêle avec celles du potager ; on en fait des monticules à l’entrée de l’hiver & au printems ; on répand le tout sur les carreaux. Ainsi la terre du fond est renouvellée par les influences de l’air & celles des monticules ; la terre neuve y apporte des sucs nouveaux qui joindront la faveur à la fécondité.

Le fumier de mouton ne s'emploie qu'en petite quantité, parce qu'il est trop chaud ; il entre dans la terre factice pour les orangers & les couches.

Il en est de même de la poudrette ; on appelle


ainsi les excrémens humains, qui, retirés des fosses, ont passé au moins trois ou quatre ans à 1'air.

Le fumier de porc est fort mauvais, & ne peut aussi s'employer qu'en petite quantité, bien passé & consommé avec d'autres.

Les fientes de poules & de pigeons sont dangereuses par la quantité d'insectes qu'elles produisent, & par l’aigre qu'elles renferment ; il faut les bannir du jardin, sur-tout celles de poule ; on peut, mais rarement, se servir de celles de pigeon bien consommées ; elles entrent alors dans la terre factice, pour les orangers & les melons. (Voyez Potager.)

(Elémens du Jardinage.)

Jardins fruitiers.

Le règne de Louis XIV fut l’époque de la perfection des arts en France. L'art des jardins fruitiers prit alors une nouvelle forme. Laquintinie parut, & les arbres, autrefois livrés à eux-mêmes, couvrirent de leurs branches, de leurs feuilles, de leurs fleurs & de leurs fruits, la nudité & la rusticité des murs. Enfin dans ses mains l’arbre prit la forme d'un espalier, d'un éventail & d'un buisson. Ce grand homme opéra une révolution presqu'aussi entière dans la culture du légumier.

Pendant que la France & l’Europe entière admiroient & adoptoient les méthodes de Laquintinie, & qu'on s'extasioit à la vue de ses espaliers, de simples particuliers, conduits par le génie de l’observation & de l'expérience, perfectionnoient à petit bruit, ou plutôt presqu'ignorés, la théorie de la taille des arbres. Enfin après des travaux soutenus pendant près d'un siècle, on a commencé à se douter que les seuls habitans du village de Montreuil avoient découvert le secret de la nature. Ce n'est que depuis quelques années que la vérité gagne de proche en proche. Il faudra bien du tems pour que la révolution soit générale & complette ; on tient à ses anciens préjugés ; on les caresse, & il est difficile d'en secouer le joug. Les partisans de la méthode de Laquintinie ne croiront pas sur paroles, & ils demanderont des preuves sur la supériorité de celle des Montreuillois. Sans entrer ici dans aucune discussion, je leur dirai seulement : « On voit encore aujourd'hui à Montreuil des pêchers plantés à la fin du siècle dernier ». Que l’on cite un pareil exemple dans les fruitiers de Laquintinie & dans tout le reste de la République. Laquintinie connut le genre de culture de ces bons travailleurs, mais trop attaché à la méthode qu'il avoit imaginée, & encouragé par les louanges que la nation, lui prodiguoit, il crut au-dessous de lui de devenir imitateur. Il avoit fait venir le jeune Pépin, cul-


Art aratoire.

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