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offre l'effet d'une estlampe. Le travail qu'on ajoute pour le colorier peut être compare à celui de l'enluminure. Ainsi la peinture sur verre doit être regardée comme une peinture d'une seule couleur que l'on finit par enluminer.

Comme la couleur rouge est la moins sujette à s'effacer avant la recuisson, c'est celle dont on couvre d'abord toutes les parties où elle dôit entrer. On pose au second rang les teintes roussâtres : on peut employer de même le lavis de blanc.

Pour les émaux verds, bleus, violets & pourpres, on ne pose pas immédiatement le verre sur le papier qui couvre la table, mais on l'éléve enroue qu'il loir en équilibre. On prei d aflez de couleur détrempée dans l'eau gommée pour emboirela partie que l'on veut colorer. Si la couleur étoit trop clairè, elle effaceroit les dessous ; si elle étoit trop épaisse, elle ne s'étendroit pas également. Il faut la coucher avec promptitude & légéreté, en inclinant le pinceau. On agite ensuite doucement la piece en tous sens, sans la toucher avec les doigts, mais la maintenant seulement par son épaisseur ; & c'est pour rendre possible cette opération qu'on ne fait pas porter la piece immédiatement sur la table, mais qu'on la met en équilibre ; ce qu'on fait ordinairement à l'aide d'un verre à boire. Par ce bercement, les parties de l'émail colorant se réunissent avec égalité. On laisse ensuitc sécher la couleur pendant deux jours. On opére de même pour l'émail blanc.

On attend que les couches de ces émaux colorans soient bien seches, avant d'appliquer la couche de jaune au revers de l'ouvrage. On la tient plus légere ou plus épaisse, suivant la teinte que l'on desire. Après l'avoir couchée, on balance la piece, comme pour les émaux précédens. On ne mêle pas de gomme avec cette couleur, & par conséquent il faut apporter beaucoup de soins pour la ménager avant la recuisson. Il est aussi une précaution à prendre enl'empoëlant : c'est qu'il n'y ait pas une piece couchée de jaune sur une autre couchée d'une autre couleur ; car le jaune, dans la fusion, pénetre toute l'épaisseur du verre, & par conséquent il dénatureroit les autres couleurs en se mêlant avec elles.


De la recuission. Ce que mes secrets de famille, dit M. le Vieil, prescrivent sur cette matiere, est contenu dans une lettre du mois de mars 1705, écrite par Guillaume le Vieil, mon ayeul, à feu mon pere, lorsque celui-ci se disposoit à travailler aux vitres peintes du dôme de l'église des Invalides. « Vous aurez sans doute, mon fils, des recuissons fort abondantes à faire pour votre entreprise de l'hôtel royal des Invalides. Vous ne pouvez mieux faire que de marcher sur mes traces, en donnant à votre fourneau la même dimension que j'avois don-


née à ceux dans lesquels j'ai recuit tous mes ouvrages de Sainte Croix d'Orléans. Ma poële étoit oblongue, à cause de la hauteur de mes pieces de frise : elle avoit dix-neuf pouces de longueur, & quatorze pouces de large hors d'oeuvre, un bon pouce & demi d'épaisseur dans le fond, un pouce sur les bords,& douze pouces du profondeur. Cette mesure de la poële, comme vous savez, doit vous diriger dans la construction de votre fourneau. Partant, il doit avoir dans oeuvre deux pieds trois pouces de haut, un pied dix pouces de large, a cause des quatre pouces de vuide que je fuis dans l'usage de laisser entre les quatre faces de la poële & les parois du fourneau : enfin votre fourreau aura deux pieds dix pouces d'élévation : savoir, dix pouces depuis le carreau de la chambre jusqu'au foyer, six pouces depuis le foyer jusqu'aux barres qui doivent supporter votre poële, un pied pour la profondeur de la poële, & six pouces depuis le haut des bords de la poële jusqu'à la calotte du fourneau. Je donne ordinairement à l'ouverture du foyer six pouces de haut sur sept de large, & au passage des essais sut le devant du fourneau, & à la hauteur de celui qui est pratiqué dans la poële, environ cinq pouces sur quatre, que je ferme avec une brique taillée de cette épaisseur & de cette hauteur, jointe aux autres avec de l'argile, ainsi que les carreaux de terre cuite dont je le couvre, comme vous m'avez vu faire. Ce fourneau m'a toujours bien réussi, & je crois qu'avec un pareil, vous ferez merveille. Il est encore une chose à laquelle vous devez porter soigneusement attention ; c'est que n'étant pas toujours maître de l'emplacement de votre fourneau, au cas que vous soyez assujetti à appliquer quelqu'un des parois sur quelque mur suspect d'humilité, vous ayez soin de le garnir hors d'oeuvre d'une double brique de ce même côté. »

La poële se place sur des barres de fer destinées à la porter. On répand sur tout son fond de la chaux vive bien tamisée, de l'épaisseur d'un demi-doigt, ou de la poudre de plâtre cuite trois fois dans un fourneau à potier ; par-dessus cette poudre, on met des morceaux de verre cassé, & par-dessus le verre de la poudre ; en sorte qu'il y ait trois lits de poudre & deux de vieux verre. Sur le troisième lit de poudre, on étend les pièces de verre peint, & on les distribue aussi par lits avec de la poudre, jusqu'à ce que la poële soit pleine, si l'on a assez d'ouvrage pour cela, ayant soin que le lit de dessus soit de la poudre.

Guillaume le Vieil ne couvroit pas entiérement de poudre ses émaux, sur-tout les bleus, verds, violets, ou pourpres. « Il se contentoit, dit son fils, de répandre du creux de la main, qu'il tenoit entr'ouverte, de pe-